400 écrivains ont répondu (anonymement) au cours du dernier trimestre 2008 à cette enquête. 34 questions pour mieux les connaître et mieux cerner la relation contractuelle avec leur éditeur.

Cette enquête exceptionnelle est à l’initiative des écrivains membres de la commission Scam de l’écrit (Olivier Weber, Claude Aziza, Catherine Clément, Alain Dugrand, Pierre Haski, Michèle Kahn, Pascal Ory, Antoine Perraud et Daniel Picouly) qui ont souhaité interroger leurs confrères auteurs de livre(s), afin d’effectuer un état des lieux des pratiques contractuelles du secteur de l’édition.


QUI SONT LES AUTEURS ?

• Un tiers des auteurs ont écrit des romans, des essais ou des nouvelles. 16 % sont auteurs en Sciences humaines et sociales et 16 % sont auteurs en Histoire et Géographie.
• 90 % des auteurs ont signé des contrats d’édition avec des éditeurs différents dont un tiers avec plus de 5 éditeurs.
• Une écrasante majorité des auteurs (92 %) signe de véritables contrats d’édition (au sens du Code de la propriété intellectuelle) et dans 59 % des cas, l’éditeur fait signer simultanément un contrat pour l’adaptation audiovisuelle du livre. La Scam tient à rappeler qu’il n’est pas obligatoire de signer un contrat d’adaptation audiovisuelle simultanément à la signature d’un contrat d’édition, l’auteur pouvant toujours réserver les droits relatifs à ce type d’exploitation.
• 2 % des auteurs utilisent les services d’un agent littéraire et se disent majoritairement (2/3) satisfaits de ses services.
Dans une écrasante majorité des cas (98 %), l’écrivain se retrouve donc, à négocier seul, son contrat d’édition.


COMMENT LEUR RÉMUNÉRATION EST-ELLE CALCULÉE ?

L’assiette

• Dans 84 % des cas, les droits de l’auteur sont calculés sur le prix de vente public HT en application à la règle générale définie par le Code de la propriété intellectuelle et pour 11 %, les auteurs sont rémunérés au forfait et donc indépendamment des ventes.
• Malheureusement, 5% des auteurs disent que leurs droits d’auteur sont calculés sur le prix de vente en gros, contrairement à ce que prévoit le législateur.

Le taux

• La moitié des auteurs n’a pas pour habitude de négocier le taux proposé par l’éditeur.
• Sur plus des 2/3 des contrats ce taux se situe entre 5 et 12 % du prix de vente HT.
• Il n’est supérieur à 12 % que dans 10 % des cas.
• Le taux appliqué n’évolue guère au cours de la carrière de l’écrivain : ils ne sont que 14 % à en déclarer une augmentation. L’ à-valoir
• 2/3 des contrats comportent un à-valoir qui a un caractère acquis dans 85 % des cas.
• Une importante majorité des à-valoir (43 %) se situe entre 1500 et 3000 euros. C’est un point crucial pour l’auteur. Le versement d’un à-valoir est obligatoire lorsque le contrat ne prévoit pas le nombre d’exemplaires du premier tirage. Cette indication figure aujourd’hui dans presque tous les contrats et la pratique de l’à-valoir est très généralisée. Son montant est très variable et sujet à négociation. D’autre part, pour éviter toute équivoque en cas de résiliation anticipée du contrat, ou en cas de mévente, il convient de faire préciser dans le contrat que l’à-valoir constitue un minimum garanti qui restera acquis à l’auteur en toute hypothèse.


QUELLE EST LA RELATION DES AUTEURS AVEC LEURS ÉDITEURS ?

• Si 60 % des auteurs se déclarent satisfaits des relations avec leurs éditeurs… 40 % se disent insatisfaits, parmi eux 9% déclarent même ces relations, conflictuelles. La reddition des comptes et le versement des droits d’auteur sont souvent la raison des litiges entre les auteurs et leur(s) éditeur(s).
• La moitié des auteurs ayant répondu témoigne de la difficulté à obtenir la reddition des comptes : 35 % ne la reçoivent qu’occasionnellement ; 16 % ne la reçoivent jamais ! Alors que l’article L. 132-13 du Code la propriété intellectuelle oblige l’éditeur à produire au moins une fois par an un état mentionnant le nombre des exemplaires vendus par l’éditeur, celui des exemplaires inutilisables ou détruits par cas fortuit ou force majeure, ainsi que le montant des redevances dues ou versées à l’auteur.
• Quand la reddition des comptes est effective, elle n’est accompagnée qu’une fois sur deux du règlement des droits.
• Par ailleurs, pour 38 % des auteurs, ce versement intervient entre trois et cinq mois après l’arrêté des comptes ; 37 % les obtiennent plus de six mois après. Les comptes doivent être rendus à l’auteur une fois par an. La plupart des contrats fixent la date de l’arrêté des comptes (le plus souvent le 31 décembre de chaque année) et un délai qui doit être court pour leur transmission à l’auteur (de un à trois mois). Certains contrats précisent que le règlement des droits dus à l’auteur interviendra« à partir du énième mois » suivant la date de l’arrêté des comptes. Une telle clause est inacceptable puisque l’éditeur ne s’engage pas sur une date précise de paiement. Il faut donc demander que le contrat contienne une clause du type : « Le relevé de compte et le règlement des droits correspondants seront adressés à l’auteur au plus tard le… »
• Une fois sur deux, l’auteur doit écrire à son éditeur pour obtenir les comptes d’exploitation. Parmi ceux qui réclament : 17 % n’obtiennent cependant jamais de réponse, ou alors avec l’aide d’un avocat dans 5 % des cas. 8 % ont même été amenés à saisir les tribunaux.
• Et lorsque les relevés de comptes parviennent aux auteurs, ceux-ci sont nombreux à ne pas les trouver clairs (44 %), ni complets (53 %). Il est vrai que 75 % ne pensent pas avoir les moyens de vérifier les informations comptables transmises par les éditeurs. Aussi, les auteurs demandent la mise en place d’un contrôle des comptes par un organisme tiers. Exploitations des oeuvres à l’étranger
• Enfin, un quart des auteurs ont eu connaissance d’exploitation de leurs livres à l’étranger… mais sans en avoir été informés par leur éditeur.
• Plus d’un tiers n’a jamais reçu de droits pour ces exploitations à l’étranger, seul un tiers des écrivains déclare recevoir systématiquement ces droits.


Si les auteurs sont plutôt satisfaits de la collaboration avec leur éditeur, ils ne sont pas certains de pouvoir lui faire totalement confiance dans la gestion de leurs droits d’auteur et se retrouvent dans la majorité des cas, isolés face à lui. C’est parce que les auteurs ont confiance en la Scam (ils se disent satisfaits de ses services à 93 %) qu’ils expriment le souhait de la voir intervenir en leur nom auprès des éditeurs afin de mettre en place une collaboration visant à apporter des améliorations sur plusieurs points :

• le respect des règles déontologiques
• la mise en place d’une charte des relations auteurs/éditeurs
• un code des usages « revisité ».

L’enquête menée par la Scam représente un formidable outil pour comprendre les relations entre les auteurs et les éditeurs. Elle confirme également la représentativité de la Scam au sein du monde des écrivains, lui permettant de revendiquer une place de médiateur. Forte de cette légitimité, la Scam demande notamment aux éditeurs et aux pouvoirs publics de travailler ensemble à l’élaboration d’un relevé de droits d’auteur harmonisé entre les différents éditeurs.