À l’occasion du Salon du livre de Paris 2012, la Scam publie son 4e baromètre des relations auteurs/éditeurs, réalisé cette année en partenariat avec la SGDL. Le nombre de répondants, 1.145 écrivains représentant tous les secteurs de l’édition, a doublé par rapport à 2011. Si les résultats confirment les tendances observées ces dernières années, ils témoignent également d’une certaine crispation : 31 % des auteurs estiment que leurs relations avec leurs éditeurs ne sont pas satisfaisantes et 8 % d’entre eux qu’elles sont conflictuelles.

Enquête réalisée du 1er décembre 2011 au 31 janvier 2012 (29 questions posées par écrit).

> Les 1.145 auteurs ayant répondu à ce baromètre représentent tous les secteurs de l’édition. Ils négocient seuls leurs contrats d’édition (à 94 %) et travaillent le plus souvent avec plusieurs éditeurs (10 % seulement d’entre eux n’ont signé de contrats d’édition qu’avec un seul et même éditeur). Ils signent à 94 % des contrats à compte d’éditeur (3 % des contrats de compte à demi et 3 % des contrats à compte d’auteur).
> 83 % des auteurs ayant répondu ont signé un ou plusieurs contrats depuis moins de 7 ans dont la moitié au cours des 12 derniers mois.
> Secteur éditorial dominant des auteurs ayant répondu (plusieurs réponses étaient possibles) :

• Littérature générale 54 %
• Universitaire, professionnel 16 %
• Livres illustrés 14 %
• Documents, essais 40 %
• Livres pratiques 12 %
• Livres jeunesse 14 %


1 – DES AUTEURS GLOBALEMENT SATISFAITS, MAIS…

L’augmentation importante du nombre d’auteurs interrogés en 2012 modifie assez largement la nature des appréciations que les auteurs portent sur leurs éditeurs ; le périmètre n’étant plus le même, « comparaison n’est toutefois pas raison ! » Les auteurs sont plus critiques en 2012 à l’égard de leurs éditeurs : 61 % des auteurs se déclarent satisfaits des relations avec leurs éditeurs, contre 71 % en 2011, et 31 % se disent insatisfaits, contre 22 % en 2011 ; 8 % estiment même que ces relations sont conflictuelles (6 % en 2011).
Ce degré de satisfaction générale, qui reste majoritaire quel que soit le genre éditorial de l’auteur, varie toutefois d’un secteur à l’autre. Il est le plus élevé chez les auteurs de livres universitaires, professionnels ou scolaires et de documents ou d’essais et il est le moins élevé chez les auteurs de littérature générale et de livres jeunesse.
Il présente également des résultats très différents selon les étapes de la relation concernées (pour lesquelles les auteurs ont noté le travail des éditeurs de 1 à 10) :

À propos des contrats proposés par l’éditeur
 : 55 % des auteurs (56 % en 2011) attribuent une note égale ou supérieure à 6 sur 10 ; 25 % d’entre eux seulement attribuent une note inférieure à 5.
À propos de la collaboration avec l’éditeur sur le travail de création : 57 % des auteurs (61 % en 2011) attribuent une note égale ou supérieure à 6 sur 10 ; 32 % d’entre eux seulement attribuent une note inférieure à 5.
À propos de l’exploitation commerciale par l’éditeur : 63 % des auteurs (67 % en 2011) attribuent une note inférieure ou égale à 5 sur 10 ; 27 % d’entre eux seulement attribuent une note supérieure à 6.
À propos de la communication et de la promotion des livres effectuées par l’éditeur : 66 % des auteurs (69 % en 2011) attribuent une note inférieure ou égale à 5 sur 10 ; 25 % d’entre eux seulement attribuent une note supérieure à 6.

Si la note moyenne générale est de 5,3 sur 10, les relations entre auteurs et éditeurs paraissent se crisper au fur et à mesure de la vie du livre. Largement favorables en amont (la note moyenne est de 6,0 pour les contrats proposés et de 5,9 pour la collaboration sur le travail de création), les appréciations des éditeurs s’inversent en aval (la note moyenne est de 4,7 pour l’exploitation commerciale et de 4,4 pour la promotion et la commercialisation).


2 – RÉMUNÉRATION : 60 % DES AUTEURS AI-DESSOUS DE 10% DE DROITS !

Le taux de rémunération moyen est désormais majoritairement inférieur à 10 % (60 % des auteurs interrogés), le taux de 10 %
restant toutefois le taux le plus fréquemment proposé (31 % des auteurs) et la fourchette de 8 à 10% concernant 54 % des auteurs.
Ils ne sont donc que 9 % à bénéficier d’un taux supérieur à 10 %, alors qu’ils sont 13 % à être au-dessous de 5 %.
Le taux de rémunération est globalement plus élevé en littérature générale (1 auteur sur 2 à 10 % ou plus et 1 auteur seulement sur
4 au-dessous de 8 %) et pour les auteurs de documents ou d’essais (44 % à 10 % ou plus et 1 auteur sur 3 au-dessous de 8 %).
La rémunération est globalement moins élevée pour les livres universitaires et les livres illustrés (40 % des auteurs au-dessous de
8%) ; elle est encore plus faible pour les auteurs de livres pratiques ou de livres jeunesse (1 auteur sur 2 au-dessous de 8%, 1 auteur
seulement sur 4 à 10 % et plus).
Enfin, 6% des auteurs ne sont pas rémunérés en proportion du prix public H.T. ni au forfait mais sur les recettes nettes de l’éditeur !


2 BIS – À-VALOIR : DES MONTANTS À LA BASSE

En 2011, 61 % des contrats proposés aux auteurs comportent un à-valoir (64 % en 2010) ; cette proportion est en diminution
depuis 3 ans.
Les à-valoir supérieurs à 3.000 € représentent 30 % du total (37 % en 2010) et les à-valoir inférieurs à 1.500 € représentent
désormais 30 % (27 % en 2010). Si la majorité des à-valoir (40 %) reste donc concentrée entre 1.500 et 3.000 € ; la proportion de faibles à-valoir est en augmentation.


3 – REDDITION DES COMPTES : UN STATU QUO INTOLÉRABLE?

L’absence de reddition des comptes ou la réception de redditions incomplètes ou incompréhensibles est un constat très largement partagé chez les auteurs. Moins de la moitié des auteurs reçoivent des redditions de comptes de la part de leurs éditeurs alors qu’elles sont obligatoires… Ceux qui les reçoivent ne les trouvent pas claires (49 %) et/ou pas complètes (55 %). Et pourtant, ils ne sont que 18 % à avoir réclamé à plusieurs reprises ces relevés de droits. Il reste difficile de mettre un éditeur en demeure de respecter la loi.
Nulle surprise qu’une écrasante majorité (94 %) soit favorable à la mise en place d’un système qui permettrait une reddition simple et exacte sans qu’ils aient à intervenir, puisqu’elle serait fondée sur les sorties de caisse des librairies.


4 – TRADUCTIONS, ADAPTATIONS, PILON… DES PRATIQUES PAS TOUJOURS CLAIRES ?

Un auteur sur 4 a eu connaissance d’une traduction de ses livres à l’étranger sans en avoir été informé par l’éditeur (proportion stable depuis 4 ans). Tous les auteurs interrogés n’ayant pas fait l’objet de traductions, ce ratio de 25 % est considérable. De surcroît, 58 % des auteurs (contre 52 % en 2011) ne reçoivent que rarement ou jamais de droits à l’occasion d’une exploitation de leurs livres à l’étranger.
Seuls 5% des auteurs ont eu connaissance d’une adaptation audiovisuelle d’une de leurs œuvres sans en avoir été informés par leur éditeur. Mais, compte tenu du nombre limité d’adaptations audiovisuelles, ce ratio n’est pas à minimiser. Dans 61 % des cas, l’éditeur a fait signer un contrat d’adaptation audiovisuelle (63 % l’année dernière). La Scam et la SGDL rappellent que la signature de ce contrat n’est pas une obligation.
Un auteur sur 4 (un sur 3 en 2011) n’a pas été informé de la mise au pilon d’un ou plusieurs de ses livres. L’information s’améliorerait-elle sur ce sujet particulièrement délicat ?


5 – NUMÉRIQUE … BEAUCOUP DE BRUIT POUR RIEN OU PRESQUE ?

La majorité des contrats ne comportent pas de clause numérique (63 %) et les éditeurs ne font guère signer d’avenants sur les contrats anciens (18 % des contrats seulement). Ces chiffres sont surprenants compte tenu du discours par ailleurs volontaire des éditeurs sur le numérique. Faut-il y voir un certain attentisme des éditeurs vis-à-vis du résultat des travaux actuels du CSPLA sur le contrat d’édition numérique ou une lecture trop rapide des contrats par les auteurs dans lesquels les éléments relatifs à l’édition numérique et à l’édition imprimée sont souvent mélangés ? Quant au pourcentage de contrats spécifiquement numériques, il est encore anecdotique aujourd’hui.
La rémunération pour l’exploitation numérique se situe majoritairement au-dessous de 15 % (60 % des réponses des auteurs), avec toutefois une proportion importante (19 %) présentant un taux de 50 %, mais sur une assiette qui n’est plus celle du prix public du livre.
De manière générale, les éditeurs proposent pour l’édition numérique un partage des droits équivalent à celui de l’édition imprimée.
La Scam et la SGDL dénoncent cette pratique, qui conduit à une baisse importante des revenus des auteurs (le prix du livre numérique étant inférieur d’environ 35 % à celui du livre imprimé), et regrettent que la question n’ait pas pu être abordée dans les négociations entre auteurs et éditeurs. Elles appellent les auteurs à la vigilance sur ce point important du contrat numérique.


6 – GESTION COLLECTIVE… EFFICACITÉ RENFORCÉE ?

Si les droits primaires des écrivains sont versés directement par l’éditeur, les droits dits secondaires sont majoritairement versés par les sociétés d’auteurs. Les auteurs interrogés perçoivent ainsi via la gestion collective :
• les droits audiovisuels ou radiophoniques (77 % des auteurs)
• le droit de prêt en bibliothèque (73 %)
• le droit de copie privée numérique (72 %)
• le droit de reprographie (59 %)


7 – LES ÉCRIVAINS ET LA FORMATION PROFESSIONNELLE

Cette année, le baromètre interrogeait pour la première fois les écrivains sur la formation professionnelle. Le verre est à moitié vide, ou à moitié plein. Un auteur sur deux n’en voit pas l’intérêt et un auteur sur deux pense qu’une formation spécifique lui serait utile !
Parmi les formations les plus souhaitées : l’utilisation des nouvelles technologies (51 %), les écritures spécifiques dont notamment l’adaptation audiovisuelle (45 %), la formation et l’information sur les aspects juridiques (45 %) sont plébiscitées. La formation à la recherche documentaire ne remporte « que » 22 % des suffrages.
À noter que 10 % des auteurs interrogés ont déjà suivi une formation spécifique ; ce sont principalement des auteurs de littérature générale, de documents ou de livres jeunesse (pour ces derniers, 1 auteur sur 3 a déjà suivi une formation).