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La Reddition des comptes d’exploitation dans l’audiovisuel

Le principe

Lorsqu’une productrice ou un producteur d’œuvre audiovisuelle signe un contrat avec un auteur ou une autrice, il ou elle s’engage à lui communiquer les recettes d’exploitation de son œuvre une fois par an. Le versement des droits étant constitué de pourcentages sur les recettes d’exploitation de l’œuvre, le législateur a en effet prévu que les sociétés de production devaient rendre compte annuellement aux auteurs et autrices des ventes effectuées de leurs œuvres.

Quand bien même cette obligation n’apparaît pas formellement dans le contrat, la loi l’impose. Elle est édictée par les articles L. 132-28 du code de la propriété intellectuelle et L. 251-9 du code du cinéma et de l’image animée et est également prévue dans l’accord relatif à la transparence des relations auteurs-producteurs d’œuvres audiovisuelles du 6 juillet 2017. Par ailleurs les syndicats de production (Uspa, Spi, SATEV) ont conclu avec la Scam une Charte aux termes de laquelle le producteur ou la productrice s’engage à rendre annuellement ces comptes d’exploitation.

Dans la plupart des cas, les clauses du contrat reprennent cette disposition légale et stipulent que la société de production communique les comptes d’exploitation à l’auteur ou à l’autrice une fois par an. Bien souvent, la même clause précise aussi que le pourcentage sur les recettes d’exploitation de l’œuvre que l’auteurice reçoit de sa société de production est versé en même temps que la communication des comptes (v. par exemple modèle de contrat Scam).

L’obligation doit être exécutée de bonne foi. Toutes les recettes doivent apparaître dans le décompte qui est envoyé à l’auteurice. Quand bien même ces recettes sont modestes ou inexistantes, la charte des usages professionnels prévoit que la société de production en doit communication aux coauteurices de l’œuvre audiovisuelle. Au besoin, ceux-ci peuvent même en demander justification, c’est-à-dire solliciter la fourniture des factures voire des contrats attestant des sommes qui sont mentionnées. Cette possibilité leur est d’ailleurs ouverte pour leur permettre de vérifier les comptes qui leur sont envoyés.

À défaut du respect de cette obligation, s’il s’avère que l’absence de reddition des comptes a causé un préjudice à l’auteurice, le contrat peut se trouver résilié ce qui veut dire que le producteur ou la productrice ne peut plus exploiter l’œuvre audiovisuelle à l’avenir. Cela ne signifie pas pour autant que l’auteurice se retrouve titulaires des droits d’exploitation sur l’œuvre.

Le juge peut aussi condamner la société de production à payer des dommages et intérêts ainsi que, le cas échéant, l’expertise rendue nécessaire par l’absence ou l’insuffisance de fourniture des comptes.

Que faire si cette obligation n’est pas respectée ?

On peut d’abord simplement rappeler par courriel, téléphone ou courrier postal à la société de production de faire parvenir les comptes. Si elle ne réagit pas, il convient ensuite d’adresser alors une lettre de mise en demeure en recommandé avec accusé de réception. La lettre constate l’absence de reddition des comptes et met en demeure le cocontractant de lui communiquer les comptes d’exploitation de son œuvre dans un délai d’une semaine ou quinze jours ou un mois (au choix), à défaut de quoi il se réserve la possibilité de saisir les tribunaux compétents (cf. modèles ci-après).

Si le producteur ou la productrice ne s’exécute pas après la mise en demeure et dans le délai qui y est mentionné, l’auteur ou l’autrice peut, avant de saisir les tribunaux, tenter une démarche amiable par le biais d’un avocat. L’auteur ou l’autrice peut également saisir l’Amapa (Association de médiation et d’arbitrage des professionnels de l’audiovisuel) de ce différend (cf. fiche juridique sur l’Amapa).

L’auteurice a encore la possibilité de lancer une procédure d’« injonction de faire ». Il s’agit de demander au tribunal de rendre une ordonnance pour obliger le débiteur à faire ce à quoi il s’est engagé, soit en l’occurrence à rendre les comptes. Le formulaire de demande d’ »injonction de faire » est disponible sur le site Internet www.service-public.fr. Si le juge estime que la requête est fondée, il rend son ordonnance. Elle est envoyée aux deux parties. Dans le cas où cette ordonnance n’est pas spontanément exécutée par le producteur ou s’il s’y oppose, il devra se rendre à une audience également fixée par cette ordonnance.

Références

Article L. 132-28 du code de la propriété intellectuelle,
Article L. 251-9 du code du cinéma et de l’image animée,
Charte des usages professionnels des œuvres audiovisuelles relevant du répertoire de la Scam,
Accord entre auteurs et producteurs d’œuvres audiovisuelles relatif à la transparence des relations auteurs-producteurs et à la rémunération des auteurs du 6 juillet 2017.

Pour plus d’information

– Sur la médiation et l’arbitrage possible dans le domaine audiovisuel, le site Internet de l’Amapa : www.lamapa.org
– Sur l’injonction de faire : http://vosdroits.service-public.fr/F1787.xhtml

La Reddition des comptes dans l’écrit

L’obligation de la maison d’édition de « rendre compte » à l’auteurice constitue l’une des obligations essentielles mise à la charge de l’éditeur en contrepartie de la cession par l’auteurice de ses droits patrimoniaux sur son œuvre.
Principe et modalités de la reddition des comptes dans le domaine de l’Écrit. Obligation renforcée et application dans le temps.