26 organisations professionnelles, parmi lesquelles la Scam, ont signé une tribune appelant à une action efficace contre le piratage.

La démocratie est fondée sur des principes fondamentaux. La liberté, inscrite au fronton de nos mairies en est un des piliers.

La liberté consiste « à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui », précise l’article 4 de la déclaration des droits de l’Homme. Dans la clarté de sa rédaction, ce texte implique que la liberté de chacun soit encadrée, pour que nos libertés individuelles et collectives soient garanties.

La liberté d’accéder aux œuvres, de les regarder, voir, entendre, partager, diffuser doit tenir compte des publics, spectateurs et auditeurs, tout autant que des auteurs, compositeurs, réalisateurs producteurs, éditeurs et autres titulaires de droits. Cet équilibre a été trouvé grâce au droit d’auteur, invention française, elle aussi issue de l’Esprit des lumières, et qui a résisté à l’air du temps et à la démagogie.

Le droit d’auteur et ses déclinaisons ont permis à la création française, notamment cinématographique, d’être ce qu’elle est, la deuxième du monde occidental, celle qui accueille tous les cinémas du monde, celle qui est portée par plus de 6 000 écrans de cinéma sur tout notre territoire. Au-delà, l’animation française est une référence mondiale incontestée, le documentaire français a un savoir-faire unique au monde et la fiction française a su reconquérir son public. Pour préserver ce modèle et projeter son succès dans les années à venir, notre création doit, au-delà du talent de chacun, trouver son équilibre économique. Les œuvres, littéraires, cinématographiques, audiovisuelles existent grâce à la volonté de leur auteur mais aussi grâce à une filière fragile, une économie du prototype, soutenue pour l’essentiel par le secteur privé, qui doit réunir des financements. Le piratage, aujourd’hui encore, en pair à pair ou en « streaming » constitue un pillage des œuvres et une limite évidente au financement de nouvelles œuvres.

Il en est de même du sport où les droits télévisés constituent une source de financement majeur, à la fois pour le sport professionnel mais aussi pour le sport amateur qui en bénéficie grâce à plusieurs mécanismes de solidarité dont la taxe Buffet. Les chaînes qui diffusent les rencontres sportives achètent l’exclusivité d’une rencontre en direct. Le piratage des matchs sur Internet menace donc, au détriment de toute la collectivité, cet équilibre économique.

La justice s’est toujours montrée favorable à la préservation des droits. Mais ceux qui piratent – et concourent au financement de filières criminelles – seront toujours plus rapides que le temps judiciaire, et les pirates trop agiles pour contourner les mesures de blocage ordonnées par un juge. Depuis maintenant une quinzaine d’années, le téléchargement, le « streaming » et la télévision par Internet sont utilisés pour violer nos droits. L’usage illicite de ces technologies éreinte nos secteurs et menace la survie de notre diversité culturelle. Il s’agit maintenant de réagir avec force et d’envoyer un signal clair.

Deux réponses concrètes peuvent être apportées au piratage. Elles n’auront de caractère pleinement opérationnel que si elles se cumulent. D’un côté, le blocage efficace et instantané de l’accès aux sites et aux services pirates par l’ensemble des intermédiaires techniques dont les fournisseurs d’accès à internet, permettrait de réduire significativement ces usages illicites, dispositif abordé dans le projet de loi sur la réforme de l’audiovisuel avec les ordonnances dynamiques. C’est une bonne chose. Mais il faut aller plus loin en permettant de rétablir une réponse graduée véritablement efficace. C’est tout le sens de la proposition de transaction pénale que nous soutenons : une sanction simple, après deux rappels à la loi pour réaffirmer que le piratage est un vol que le pays de l’exception culturelle ne peut tolérer plus longtemps.

Les forces vives de la création, littéraire, musicale, audiovisuelle et cinématographique, et le monde du sport demandent avec insistance que leurs droits soient enfin respectés comme ils respectent ceux de tous : la loi audiovisuelle qui sera examinée dès la semaine prochaine à l’Assemblée nationale, est une occasion unique que nous ne pouvons pas manquer. Il faut avoir le courage de faire ce qui est juste.

La liberté de télécharger s’arrête là où commence le vol de ceux qui créent, innovent, prennent tous les risques : il s’agit maintenant de le rappeler, ensemble et avec force.

Signataires

Association du Cinéma Indépendant pour sa Diffusion (ACID)
Association de Lutte contre la Piraterie Audiovisuelle (ALPA)
Association des Producteurs Indépendants (API)
Société civile des Auteurs Réalisateurs Producteurs (L’ARP)
Distributeurs Indépendants Réunis Européens (DIRE)
Fédération des industries du Cinéma de l'Audiovisuel et du Multimédia (FICAM)
Fédération Nationale des Editeurs de Films (FNEF)
Fédération Nationale des Cinémas Français (FNCF)
Guilde Française des Scénaristes
Groupement National des Cinémas de Recherche (GNCR)
Société civile des Producteurs de Cinéma et de Télévision (PROCIREP)
Société des auteurs et compositeurs dramatiques (SACD)
Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (SACEM)
Scénaristes de Cinéma Associés (SCA)
Société civile des auteurs multimédia (SCAM)
Syndicat des Distributeurs Indépendants (SDI)
Syndicat de l'Edition Vidéo Numérique (SEVN)
Syndicat Français des Artistes Interprètes (SFA)
Syndicat Français des Agents Artistiques et Littéraires (SFAAL)
Syndicat National des Auteurs et des Compositeurs (SNAC)
Syndicat des Producteurs de Films d’Animation (SPFA)
Syndicat des Producteurs Indépendants (SPI)
Syndicat des Professionnels des Industries de l'Audiovisuel et du Cinéma (SPIAC)
Société des Réalisateurs de Films (SRF)
Union des Producteurs de Cinéma (UPC)
Union Syndicale de la Production Audiovisuelle (USPA)