Retour avec Hervé Rony, directeur général de la Scam sur les évolutions récentes du secteur et les chantiers à venir. Une interview signée Julien Fournier pour Écran Total (16 mars 2016 – n°1084).



Quel
regard
portez-vous
sur
la
nomination
d'Audrey
Azoulay
comme
ministre
de
la
Culture
?

Sa
personnalité
est,
pour
nous,
rassurante
:
c'est
quelqu'un
qui
connaît
extrêmement
bien
le
secteur
d
e
l'audiovisuel
et
d
u
cinéma,
donc
les
enjeux
auxquels
la
Scam
est
confrontée.
Nous
étions
au
demeurant
satisfaits
du
travail
accompli
par
Fleur
Pellerin,
notamment
au
niveau
européen,
sur
la
défense
du
droit
d'auteur
et
sur
la
façon
dont
elle
a
mobilisé
le
gouvernement
et
les
professionnels
contre
certaines
orientations
de
la
Commission
Juncker.
Nous
attendons
d'Audrey
Azoulay
qu'elle
reste
fortement
mobilisée
sur
la
question
du
droit
d'auteur
en
Europe,
qui
est
primordiale.


Comment
la
Scam
appréhende-t-elle
les
enjeux
du
marché
unique
numérique
européen
?

Il
faut
favoriser
la
circulation
des
œuvres
en
Europe
mais
n'accusons
pas
la
propriété
intellectuelle
de
tous
les
maux.
Nous
attendons
de
savoir
ce
que
la
Commission
va
proposer
comme
réforme
de
la
directive
droit
d'auteur.
Nous
avons
été
rassurés
par
le
vote
au
Parlement
du
rapport
Reda
initialement
inquiétant.
Notre
souci
est
d'éviter
la
multiplication
des
exceptions
au
droit
d'auteur.
Pour
l'instant,
la
Commission
a
proposé
un
règlement
sur
la
portabilité
des
offres
et
nous
y
sommes
favorables.
On
a
l'impression
que
la
Commission,
qui
avait
de
manière
tonitruante
annoncé
une
vaste
remise
en
cause
du
droit
d'auteur,
a
mis
beaucoup
d'eau
dans
son
vin.
Tant
mieux.
En
Europe,
ce
n'est
pas
le
droit
d'auteur
le
problème
!
En
réalité,
l'harmonisation
du
marché
est
compliquée
par
la
diversité
culturelle
extrême
du
Vieux
Continent.
C'est
parfait
que
tous
les
Européens
aient
accès
aux
mêmes
œuvres
partout
en
Europe.
Mais
les
films
qui
intéressent
les
Français
n'intéressent
pas
forcément
les
Danois,
les
Allemands
ou
les
Néerlandais.
Il
y
a
une
part
de
territorialité
de
la
culture.
Ce
qui
compte,
c'est
que
les
auteurs
soient
correctement
rémunérés
lorsque
leurs
œuvres
circulent,
notamment
sur
le
Net.
C'est
pourquoi
la
SAA,
qui
défend
nos
droits
à
Bruxelles,
plaide
pour
un
droit
à
rémunération
minimum
et
équitable
pour
l'exploitation
en
ligne.

Sur
le
plan
national,
la
Scam
a
salué
la
signature
de
l'accord
sur
la
transparence
entre
producteurs
et
diffuseurs
tout
en
exprimant
le
souhait
qu'un
accord
similaire
soit
conclu
entre
auteurs
et
producteurs…

Le
gouvernement
était
inquiet
que
l'on
ne
signe
pas
cet
accord.
Or
il
n'y
a
pas
matière
à
s'inquiéter.
Notre
souci,
c'est
que
l'on
estime
que
certains
points
n'ont
pas
été
traités
(la
reddition
des
comptes,
la
question
des
conditions
d'amortissement
des
films
et
les
modalités
de
prise
en
compte
du
crédit
d'impôt)
alors
qu'ils
méritent
d'être
l'objet
de
discussions
spécifiques

ce
que
la
ministre
a
reconnu

dans
le
cadre
d'un
accord
entre
auteurs
et
producteurs.
Il
faut
que
celui-ci
se
fasse
rapidement,
avant
que
le
texte
de
la
loi
Création
soit
délibéré
en
seconde
lecture
à
l'Assemblée.
Des
rendez-
vous
ont
déjà
été
pris.

Comment
se
positionne
la
Scam
sur
les
questions
de
production
dépendante
et
indépendante
qui
préoccupent
aujourd'hui
le
secteur ?

Il
faut
rester
le
plus
possible
dans
le
cadre
d'accords
professionnels.
Il
me
semble
que
ce
n'est
pas
au
Parlement
de
légiférer
de
façon
unilatérale
pour
trancher
cette
question.
Jean-Pierre
Leleux
avait
raison
de
soulever
ces
questions,
mais
je
pensais
qu'à
la
suite
des
débats
du
Fipa,
il
retirerait
ses
amendements.
Il
les
a
maintenus.
Cela
tend
inutilement
la
situation
alors
que
le
mieux,
me
semble-
t-il,
est
de
mettre
les
gens
autour
de
la
table
et
de
les
laisser
discuter.

La
Scam
insiste
par
ailleurs
sur
l'importance
de
l'indépendance
des
médias…

Il
y
a
eu,
pour
dire
les
choses
avec
diplomatie,
quelques
maladresses
au
sein
du
groupe
Canal+,
avec
un
soupçon
d'intervention
un
peu
trop
directe
de
l'actionnaire,
avec
la
déprogrammation
d'un
documentaire
et
d'un
grand
reportage.
Il
ne
faut
pas
exagérer
et
accuser
tous
les
capitaines
d'industrie
de
vouloir
museler
l'information,
mais
être
prudent.
Je
constate
avec
satisfaction
que
le
CSA
s'est
saisi
de
la
question
et
que
Patrick
Bloche
a
déposé
une
proposition
de
loi
sur
l'indépendance
des
médias.
Nous
lui
avons
adressé
nos
remarques
et
sommes
disposés
à
en
discuter
avec
lui.

Le
discours
de
Delphine
Ernotte
est
axé
sur
la
fiction
mais
très
peu
sur
le
documentaire…

Effectivement.
Nous
l'avons
rencontrée.
Elle
nous
a
semblé
très
à
l'écoute
et
a
une
vision
du
service
public
qui
nous
semble
exigeante.
Mais
il
y
a
une
inquiétude
globale
des
documentaristes.
Même
si
on
a
la
chance
d'avoir
un
service
public
qui
investit
beaucoup
dans
ce
genre,
il
y
a
une
tendance
au
formatage…
Les
auteurs
constatent
qu'on
leur
demande
de
plus
en
plus
d'écrire
d'une
certaine
manière.
D'où
notre
volonté
d
e
signer
une
charte
des
bonnes
pratiques
professionnelles,
sur
les
questions
éditoriales,
entre
auteurs
et
diffuseurs.
Message
a
priori
bien
reçu.
Nous
voulons
dialoguer
avec
les
équipes
et
que
FTV
maintienne
une
forte
exigence
dans
l'écriture
documentaire.

Quid
de
l'évolution
de
la
politique
de
France
3
en
matière
de
documentaires
régionaux
?

Nous
avons
des
échanges
avec
Dana
Hastier
sur
ce
point.
Nous
allons
organiser
une
réunion
avec
les
pôles
régionaux
de
France
3.
La
chaîne
a
décidé
de
supprimer
Case
de
l'oncle
e
t
d'investir
dans
moins
de
films
qu'auparavant,
mais
mieux.
Cela
peut
s'entendre,
mais
il
y
a
une
réelle
inquiétude.
Les
documentaires
régionaux
sont
pour
les
auteurs,
jeunes
notamment,
une
façon
de
dé-
marrer
une
carrière.
C'est
un
réseau
intéressant,
donc
s'il
y
a
moins
de
documentaires,
cela
pose
certaines
questions…

La
situation
en
région
est
d'autant
plus
tendue
que
du
côté
de
la
production
et
des
télés
locales,
le
CNC
remet
à
plat
le
dispositif
d'aides.
Or,
la
concertation
avec
ce
dernier
n'est
pas
chose
aisée.
Nous
devons
poursuivre
les
discussions
dans
un
climat
tendu.
Les
pouvoirs
publics
doivent
bien
comprendre
la
grave
crise
qui
secoue
le
milieu
du
documentaire
en
régions.
Des
apaisements
sont
indispensables
pour
préserver
ce
secteur.

Propos
recueillis
par
Julien
Fournier

Repères

1986
: Hervé Rony débute
sa
carrière
dans
les
services
du
premier
ministre
puis
à
la
CNCL
et
au
CSA

1991
:
conseiller
auprès
de
la
direction
de
RTL
pour
les
affaires
juridiques
et
le
développement

1994

2009
:
directeur
général
du
Snep

Depuis
2010
:
directeur
général
de
la
Scam