Sommaire

> Marcel Trillat, description d’un combat
> Les commissions de la Scam 2007
> La répartition des droits
> Prix Roger Pic
> Copie privée : une approche pragmatique
> Royaume Uni : une décision équitable pour les créateurs
> Dialogue entre Papous
> Fiche juridique : le droit de prêt public de livres

Un milliard de fichiers piratés ont été échangés dans notre pays en 2006 (discours de la ministre Christine Albanel le 5 septembre 2007)

L’édito du président : « Les milliards du numérique » par Guy Seligmann

Les Français sont les champions du monde de la contrefaçon musicale aujourd’hui, audiovisuelle demain. Autre forme de piratage : après les Italiens, les Français sont champions d’Europe de la fraude fiscale. On peut voir là deux manifestations de l’esprit frondeur si singulièrement français mais aussi illustré autrement et plus politiquement par « l’ouvrier français né malin, c’est un frondeur, une forte tête » (Sartre : La mort dans l’âme) et par le Prince des frondeurs, le Figaro de Beaumarchais, inventeur par ailleurs du droit d’auteur, autre forme
de fronde contre les Marchands de Théâtre à la fin du XVIIIe siècle.
Cet esprit de fronde, de résistance, constamment critique, à l’autorité établie, et à la réglementation trouve aujourd’hui sur Internet un champ d’application idéal.
Au nom de la gratuité et grâce au savoir faire reconnu des ingénieurs français en matière de logiciels (en vente à la Fnac dirigée par Denis Olivennes et chargé de mission du Gouvernement), les fraudeurs disposent de tous les outils idéologiques et techniques.
Idéologiquement, affirmons donc en paraphrasant Proudhon, autre frondeur : « La gratuité, c’est le vol » et techniquement réglementons le numérique.
Il faut faire vite –c’est le rôle de la négociation en cours entre le Gouvernement représenté par Denis Olivennes et les associations de professionnels–, et bien –en trouvant un équilibre économique satisfaisant tous les intéressés. Le chemin vers cet équilibre est tortueux et escarpé.
En jeu sur ce chemin là, il y a beaucoup d’argent. Celui des auteurs, leurs droits pour beaucoup d’entre eux –on le sait à la Scam aussi bien qu’à la Sacd ou à la Sacem– sont devenus au fil du temps l’essentiel de leurs revenus, celui des industriels aussi.
L’équilibre doit donc être juste, c’est impératif sous peine de graves dommages et conflits nuisibles à tous.
Pour aller de la Fronde à la Fraude il suffit d’un changement de syllabe. Ce n’est rien une syllabe, mais c’est un Rubicon qu’il ne faut pas franchir. Ce sera au Gouvernement de prendre les décisions justes. Lui seul peut le faire en tranchant, c’est-à-dire en légiférant tant les oppositions d’intérêts sont violentes, soutenues à Paris comme à Bruxelles, par de puissants groupes face aux auteurs disposant de leur seule et légitime voix, dont l’exception culturelle à la française reste l’expression la plus forte. Un milliard : cela compte numériquement, économiquement, électoralement, politiquement enfin. C’est bien pourquoi il appartient au Gouvernement de décider et finalement, puisqu’il décide de tout à Nicolas Sarkozy, Président de la République, garant constitutionnellement d’un autre équilibre, celui des pouvoirs. Pareillement, sur Internet, les pouvoirs, celui de l’argent surtout, doivent être équilibrés. Ne faisons pas du numérique, ce possible champ d’action culturelle
–terrain d’exercice favori des auteurs– un champ de bataille furieux qui ne laisserait le long du chemin que des victimes trop nombreuses, à l’instar de celles de la Fronde qui effraya tant le jeune Louis XIV et fit trembler le Royaume. En France donc des millions de pirates face à 200 000 auteurs. Il faut trouver un équilibre. La paix sociale numérique en dépend.