Guy Seligmann, président de la Scam, dénonce la politique de diffusion documentaire de la télévision publique.

C’est un rituel chaque année d’écrire que le Fipa est devenu le festival où le meilleur de la production documentaire est sélectionné. Cette 16e édition ne faillira pas à cette mission assignée par Michel Mitrani à Pierre-Henri Deleau et assurée avec fidélité depuis lors.

C’est rituel, chaque année, de déplorer les horaires tardifs de diffusion de la plupart des documentaires présentés ici à Biarritz.

Cette année, cette déploration Scam « Around midnight » figure en annexe au rapport de Catherine Clément qui jette une lumière crue sur cette rituelle question ! Pourquoi le service public de télévision française n’a-t-il pas une réelle politique de diffusion documentaire ?

Cette question, la Scam va la poser aux téléspectateurs : « Nul ne connaît l’avis des téléspectateurs, destinataires réduits au rôle de muets du sérail » note Catherine Clément. La Scam va donc leur donner la parole. Pour qu’ils puissent dire ce qu’ils attendent de leur télévision en partie financée – mal nous le disons depuis vingt ans – par Leur redevance. Ne doit-on pas, de ce simple fait, écouter, entendre, prendre en compte ce que pensent et disent les téléspectateurs ?

Comme les électeurs dont la parole semble oubliée par les politiques, les demandes des téléspectateurs ne semblent pas être entendues. Cette surdité a pour effet de creuser de plus en plus profond le fossé entre l’électeur-téléspectateur et sa représentation parlementaire ; l’abstention en est la plus patente manifestation qui met en pleine lumière l’écart béant qui sépare le discours des politiques de ce qu’ils font. Depuis plus de vingt ans, il en est de même de la télévision publique.

Ces horaires tardifs ne sont qu’un symptôme du mal-être du service public, du mal à être un service public. L’horloge de France Télévisions est détraquée. Nous ne sommes pas les seuls à le constater depuis longtemps. Remettre à l’heure la pendule du service public – il suffit parfois d’un doigt sur la grande aiguille politique – c’est sans doute la remettre à l’heure du public. Cessons donc de faire du public de France Télévisions un « muet du sérail ».

Cessons donc « de jouer sur l’art de la parole » et disons « à tous les orateurs politiques, qui sous le nom de lois, ont rédigé des écrits que si, en composant ces ouvrages, ils ont connu la vérité, s’ils peuvent en venir à la discussion et défendre ce qu’ils ont écrit, et si l’orateur en eux est capable de faire pâlir l’auteur, ce n’est point leur activité d’écrivain, mais le souci de la vérité qui leur vaudra leur nom ».

C’est de Platon, c’est dans le Phèdre, c’est écrit il y a 25 siècles et c’est toujours d’actualité.

Guy Seligmann