Pour sa 11e édition sur fond de crises, le festival du film documentaire de Lasalle invite les citoyens à refaire le monde…



« Nous sommes entrés en crise, incrédules puis fatalistes. Nous allions «dans le mur», bien entendu, mais cette perspective restait fuyante, comme une ligne d’horizon. Nous accusions volontiers les augures de se complaire dans le catastrophisme.
Une fois levés les derniers doutes, la résignation a pris le relais ; longtemps l’Occident s’est enorgueilli de sa combativité, sa capacité à bousculer les choses ; l’émergence d’une «pensée unique» a changé cela ; depuis trente ans, nous nous sommes aplatis, au ras des pâquerettes : ce qui est là est là, et bien là, il faut «faire avec», etc…. Nous avons mis notre point d’honneur à proclamer l’absence d’alternative, à invoquer un principe de réalité. Sale temps pour les utopistes.

Nous avons accueilli la situation comme une épreuve, nous avons rentré les épaules, songé à nous mettre à couvert.
Il faut admettre que le tableau n’a rien de réjouissant… Les experts de tous bords accréditent la thèse d’une lame de fond plus redoutable que celle de 1929 ; un spectre hante la planète, celui de la faillite ; le défaut de paiement est devenu une menace si présente qu’on l’appelle maintenant, entre gens bien informés, le «défaut» tout court.
Les métaphores anxiogènes se multiplient, du château de cartes à la série de dominos ; il n’est plus question que d’écroulement, à court ou moyen terme.

Certes la catastrophe annoncée n’a rien de «naturel», mais nous l’attendons avec la même passivité qu’un ouragan ou un tsunami.(…) Il revient maintenant aux citoyens de se montrer plus responsables que les pouvoirs établis. C’est en relevant ce défi que nous combattons le mieux une peur diffuse, multiforme, qui trouve surtout à s’alimenter dans l’attentisme, dans le repli sur soi, dans l’auto-réduction au statut de victimes.

On reproche parfois aux documentaristes de prendre un malin plaisir à souligner ce qui ne va pas ; c’est faire un gros contresens sur le sens de leur démarche : s’ils s’obstinent à tarauder le réel, le mettent à la question, lui refusent le droit à la complaisance et aux indulgences plénières, ce n’est pas par masochisme, ou par délectation morose ; c’est parce qu’ils se sentent portés par un optimisme de fond, et que leurs exigences sont à la mesure des espérances qui les animent.
A leur exemple, retrouvons le goût de penser et d’agir, et savourons ce juste retour des choses : hier interdits de rêver, nous voici mis en demeure de refaire le monde !« 

Au programme de cette édition 
> la projection d’une cinquantaine de films dont :
– « Nous, Princesses de Clèves » de Régis Sauder et Anne Tesson (Etoile de la Scam 2011), « Les Nouveaux Chiens de Garde » de Gilles Balbastre et Yannick Kergoat, « les fils de la terre » de Édouard Bergeon, « les fauves » de Patrick Rotman, « Les Conti » de Jérôme Palteau, «  ceci n’est pas un film » de Jafar Panahi et Mojtaba Mirtahmasb, « 5 Broken Cameras – 5 caméras cassées » de Emad Burnat et Guy Davidi,
Dans les rues de Kaboul : Trois films documentaires réalisés par les élèves des Ateliers Varan à Kaboul en 2011
– Trois films de Stefano Savonna dont «  Tahrir Place de la Libération  »

> des rencontres professionnelles autour du travail de Michaël Gaumnitz, d’Eyal Sivan…


> Voir le programme sur le site du festival