Dans le cadre des Rendez-vous du Figra 2022, venez assister à la rencontre « Images et vérités », autour d’Albert Londres, proposée par Hervé Brusini, Président du Prix Albert Londres et parrain du Figra.

Images et vérités

On ne pensait plus avoir à écrire ces quelques mots, et pourtant : « une guerre fait rage sur le sol européen». Venues de toutes parts – armée, simples civils, ou journalistes – les images abondent. Sans être là-bas en Ukraine, nous y sommes néanmoins à travers nos écrans. Sur ce champ de bataille des regards, le photographe occupe une place toute particulière, bien qu’aujourd’hui on considère qu’il n’est plus le seigneur chargé de représenter la violence des hommes. On publie moins ses clichés, on le rétribue au lance-pierre! Pourtant, pas une guerre sans la référence édifiante d’un cliché. Celui de la petite fille napalmée du Viêt-Nam, le GI mort à plat ventre sur une plage normande, le Poilu dans la boue des tranchées, cette femme de Sarajevo fauchée par un sniper, le petit corps du réfugié Aylan, Alep devenue Pompéi…

À la rencontre des photographes de guerre

Le reporter se fait rapporteur de guerre, comme le dit Patrick Chauvel. Ou quand l’image impose aux yeux de tous, la folle cruauté des hommes. L’image, soudainement redevenue force de vérité. L’image que l’on se doit d’authentifier, mais l’image qui informe, interroge, obsède parfois. L’image grâce à celle ou celui qui a déclenché son appareil et nous déclenche du même coup. Qu’il, ou elle en soit remercié(e), d’autant que cette image de guerre et son auteur, possèdent une longue histoire, toujours périlleuse par définition. Une histoire de vérité, qui accompagne celle du grand reportage, avec au premier plan, celle de l’un des plus remarquables envoyés spéciaux, Albert Londres.

À la rencontre d’Albert Londres photographe

Lui, le globe-trotter des années 20 et 30 aimait à dire : « quelquefois, de bons bourgeois, nous voyant partir, disent : « Ah, quelle chance vous avez de voyager ainsi ! Comme je voudrais être à votre place ! »… Mais en réalité, nous les journalistes, nous arrivons très souvent au moment où les gens paisibles, tenant à leur sécurité, s’en sauvent en toute hâte… » C’est bien ce que l’on voit en ce moment où des familles ukrainiennes fuient par millions le rouleau compresseur de l’agresseur russe… Et cela sous l’objectif ou la plume des correspondants du monde entier. Être sur place pour voir et rendre compte.

Quand Albert Londres et la photographie se rencontrent

A l’aube des années 1920, Londres a accompagné, après d’autres de par le monde, comme Jack London, la montée en puissance de l’image dans l’information, ce que l’on appellera le photojournalisme. La chose est peu connue, mais le poète devenu grande
signature de la presse était aussi photographe. Et il n’est pas rare de voir son ombre portée sur plusieurs clichés des quelques 800 photos signées par le reporter.

La photo devient alors au fil des années le prolongement évident de ce professionnel du terrain. Et c’est ainsi qu’apparaît une dimension nouvelle du travail de Londres en prise avec les événements du monde, et les injustices des sociétés de l’époque, la française en particulier. Londres a eu cette phrase devenue la devise de la profession, « le journaliste n’est pas là pour faire plaisir, mais pour plonger la plume dans la plaie… » De fait, la plume s’est vite associée au boîtier photographique. Dans l’un de ses papiers écrits pour dénoncer le massacre causé dans la population noire par la construction de la voie ferrée
Congo-Océan -pas moins de 17 000 victimes- Londres lance un avertissement :
« …Et si monsieur le ministre des colonies ne me croit pas, je tiens les photos à sa disposition… » Étonnant de constater la force de preuve de l’image par celui que l’on connait essentiellement pour ses reportages écrits. Avec Londres et le photoreporter d’aujourd’hui, le journalisme, avide de produire tout ce qui concourt à la vérité, rassemble le mot et l’image. Comme les deux jambes de la célèbre statue de Giacometti : L’homme qui marche.