Lisez la tribune publiée dans Le Monde à l’initiative de l’intersyndicale de l’audiovisuel public et des organisations professionnelles du cinéma et de l’audiovisuel.

L’audiovisuel public mérite un débat sérieux !

Nos organisations regroupent des salarié·es travaillant directement ou indirectement pour les entreprises de l’audiovisuel public, des autrices et auteurs, des entreprises de création, de production et de diffusion d’œuvres cinématographiques et audiovisuelles.

Nous avons, les unes et les autres, alerté, pétitionné, mobilisé, argumenté longuement pour décrire les dangers d’une suppression de la contribution à l’audiovisuel public (CAP, ex-redevance).

Nous avons dit et redit que le pouvoir d’achat était un problème trop sérieux pour se satisfaire de demies ou de fausses mesures qui n’amélioreront pas la vie de nos concitoyens et fragiliseront l’audiovisuel public.

Nous avons démontré la nécessité de conforter les entreprises de l’audiovisuel public, dont l’indépendance de financement par une taxe affectée constitue la base de l’indépendance éditoriale, pour assumer ses missions : informer, éduquer, divertir.

Nous avons rappelé l’utilité indéniable du service public, accrue par la crise sanitaire, permettant in extremis de pérenniser France 4 comme chaîne de la jeunesse et de la culture.

Nous avons montré que les entreprises de l’audiovisuel public, France Télévisions, Radio France, L’INA, France Médias Monde, TV5Monde, Arte jouent un rôle essentiel de soutien à l’investigation, à la création et à la diffusion du cinéma, de la fiction, du documentaire, du film d’animation, du spectacle vivant et de la musique.

Nous n’avons reçu en retour que des assertions se voulant « rassurantes » et aussitôt contredites par des projets de fusion et des propos dénigrant nos activités.
Nous avons été auditionnés par la mission IGAC–IGF (Inspection générale des Affaires Culturelles et Inspection générale des Finances) mandatée par le précédent Premier Ministre, mais nous venons à peine de prendre connaissance de ce rapport, la veille du 14 juillet, alors qu’il pointe un risque constitutionnel.

Nous avons fait des propositions constructives pour faire évoluer la CAP, pour l’adapter aux nouveaux usages et la moderniser, en changer l’assiette, la rendre plus juste par une progressivité selon les revenus, pour aller plus loin que la seule exonération touchant déjà les 4 millions de ménages les plus pauvres. Et surtout ne pas faire dépendre son budget de décisions annuelles dans un contexte forcément tendu.

Nous avons constaté qu’en Europe, les pays (Allemagne, Italie, pays scandinaves, Suisse) qui ont conforté le financement par une taxe affectée ont aussi conforté leurs services publics, dans des contextes où bien souvent la lutte contre la désinformation de masse devient une priorité.

A contrario, dans les quelques pays qui ont fait le choix de la budgétisation et ont délaissé le financement de leur audiovisuel public par une taxe affectée, leur délitement est rapidement arrivé, avec le train des économies et parfois des attaques contre l’indépendance et la liberté, portées par l’extrême droite quand elle est au pouvoir.

Sur l’ensemble de ces points, de ces travaux, nous n’avons été pour l’instant ni écoutés ni entendus par le Président de la République et son Gouvernement.

Aujourd’hui, au-delà de nos différences, nous, salarié·es, journalistes, autrices et auteurs, réalisatrices et réalisateurs, responsables de structures de production et de diffusion refusons, que le nécessaire débat sur l’audiovisuel public et son financement soit confisqué et escamoté au détour d’un projet de loi de finances rectificatif au cœur de l’été et au profit d’un tour de passe-passe budgétaire.

Il n’est pas raisonnable d’improviser ni de préempter l’avenir du service public de l’audiovisuel sans qu’une réflexion approfondie n’existe, sans que les forces vives de ce pays, sans que les parlementaires, n’aient le temps de participer à une réelle concertation et à un débat commun.

Un débat qui porte sur les missions de service public, le besoin de conforter et de développer les œuvres et programmes que nous concevons, fabriquons et diffusons pour et sur nos services publics.

Un débat qui porte sur l’indépendance et sur les enjeux de diversité culturelle et d’information.

Un débat qui porte sur la démocratie et le rôle que doit jouer en sa faveur l’audiovisuel public et tout l’écosystème dont nous sommes les actrices et acteurs.

Un débat qui porte sur un financement public, qui garantisse la justice fiscale et un rendement dynamique.

Nous exigeons ce vaste débat public à la rentrée de septembre, plutôt qu’un passage en force en plein mois d’août.

Un débat public, citoyen, essentiel, républicain.

Parmi les premiers signataires

David André, réalisateur

Feurat Alani, journaliste, écrivain

Laura Alcoba, écrivaine

Yann Arthus-Bertrand, réalisateur

Thaddee Bertrand, monteur

Julie Bertuccelli, cinéaste, présidente de la Cinémathèque du Documentaire

Lise Blanchet, journaliste,

Jean-Pierre Bloc, monteur

Hervé Brusini, journaliste, président du Prix Albert Londres

Gilles Cayatte, réalisateur

Matthieu Chatelier, réalisateur

Catherine Clément, écrivaine, philosophe

Seb Coupy, réalisateur

Mathilde Damoisel, réalisatrice

Florence Dauchez, journaliste

Jean-François Delassus, écrivain

Leila Djitli, journaliste et réalisatrice,

Amalia Escriva, réalisatrice

Marc Faye, réalisateur

Colette Fellous, écrivaine, productrice radio

Anne Georget, réalisatrice, présidente du Fipadoc

Nicolas Glimois, réalisateur

Pascal Goblot, réalisateur

Tania Goldenberg, réalisatrice

Jacques Graf, photographe,

Geneviève Guicheney, journaliste

Danielle Jaeggi, réalisatrice

Isabelle Jarry, écrivain

Patrick Jeudy, réalisateur

Elisabeth Kapnist, réalisatrice

Samy Ketz, journaliste AFP

Baudouin Koenig, réalisateur

Rémi Lainé, réalisateur, président de la Scam

Roméo Langlois, journaliste France 24

Georgi Lazarevski, réalisateur

Karine Le Bail, chercheuse CNRS, productrice radio

Gwen Le Gouil, journaliste

Thomas Legrand, journaliste éditorialiste France Inter

Sébastien Lifschitz, réalisateur

Virginir Linhart, réalisatrice

Marie Maffre, réalisatrice

Marie Mandy, réalisatrice

Alexis Marant, réalisateur

Jean-Paul Mari, journaliste

Xavier Marquis, auteur réalisateur,

Claudia Marschal, réalisatrice

Laëtitia Moreau, réalisatrice

Emmanuel Moreau, journaliste,

Anita Perez, monteuse
Rithy Panh, réalisateur

Jean-Pierre Perrin, journaliste, écrivain

Nicolas Philibert, réalisateur

Anne Poiret, réalisatrice

Jean-Claude Pomonti, journaliste, écrivain

Jérôme Prieur, réalisateur

Philippe Pujol, journaliste, écrivain

Tania Rakhmanova, réalisatrice

Isabelle Rey, autrice,

Philippe Rochot, journaliste

Françoise Romand, réalisatrice

Marie-Monique Robin, réalisatrice

Hervé Rony, directeur général de la Scam

Bertrand Rosenthal, journaliste,

Christian Rosset, producteur de création radiophonique

Patrick de Saint-Exupéry, journaliste

Marie-Pierre Samitier, journaliste

Nathalie Sapena, journaliste

Guy Seligmann, réalisateur, ancien président de la Scam,

Caroline Swysen, réalisatrice

Frédéric Tonolli, réalisateur

Charlotte Tourres, monteuse

Anja Unger, réalisatrice

Bénédicte Van der Maar, photographe

Jean-Robert Viallet, réalisateur

Tomas Van Houtryve, photographe,

Tristan Waleckx, journaliste

Olivier Weber, écrivain, journaliste

Ruth Zilbermann, réalisatrice

Josianne Zardoya, réalisatrice