
18 juillet 2022
Sauvons l’audiovisuel public : plus de 450 personnalités du cinéma et de l’audiovisuel appellent à un débat sérieux
Lisez la tribune publiée dans Le Monde à l’initiative de l’intersyndicale de l’audiovisuel public et des organisations professionnelles du cinéma et de l’audiovisuel.
L’audiovisuel public mérite un débat sérieux !
Nos organisations regroupent des salarié·es travaillant directement ou indirectement pour les entreprises de l’audiovisuel public, des autrices et auteurs, des entreprises de création, de production et de diffusion d’œuvres cinématographiques et audiovisuelles.
Nous avons, les unes et les autres, alerté, pétitionné, mobilisé, argumenté longuement pour décrire les dangers d’une suppression de la contribution à l’audiovisuel public (CAP, ex-redevance).
Nous avons dit et redit que le pouvoir d’achat était un problème trop sérieux pour se satisfaire de demies ou de fausses mesures qui n’amélioreront pas la vie de nos concitoyens et fragiliseront l’audiovisuel public.
Nous avons démontré la nécessité de conforter les entreprises de l’audiovisuel public, dont l’indépendance de financement par une taxe affectée constitue la base de l’indépendance éditoriale, pour assumer ses missions : informer, éduquer, divertir.
Nous avons rappelé l’utilité indéniable du service public, accrue par la crise sanitaire, permettant in extremis de pérenniser France 4 comme chaîne de la jeunesse et de la culture.
Nous avons montré que les entreprises de l’audiovisuel public, France Télévisions, Radio France, L’INA, France Médias Monde, TV5Monde, Arte jouent un rôle essentiel de soutien à l’investigation, à la création et à la diffusion du cinéma, de la fiction, du documentaire, du film d’animation, du spectacle vivant et de la musique.
Nous n’avons reçu en retour que des assertions se voulant « rassurantes » et aussitôt contredites par des projets de fusion et des propos dénigrant nos activités.
Nous avons été auditionnés par la mission IGAC–IGF (Inspection générale des Affaires Culturelles et Inspection générale des Finances) mandatée par le précédent Premier Ministre, mais nous venons à peine de prendre connaissance de ce rapport, la veille du 14 juillet, alors qu’il pointe un risque constitutionnel.
Nous avons fait des propositions constructives pour faire évoluer la CAP, pour l’adapter aux nouveaux usages et la moderniser, en changer l’assiette, la rendre plus juste par une progressivité selon les revenus, pour aller plus loin que la seule exonération touchant déjà les 4 millions de ménages les plus pauvres. Et surtout ne pas faire dépendre son budget de décisions annuelles dans un contexte forcément tendu.
Nous avons constaté qu’en Europe, les pays (Allemagne, Italie, pays scandinaves, Suisse) qui ont conforté le financement par une taxe affectée ont aussi conforté leurs services publics, dans des contextes où bien souvent la lutte contre la désinformation de masse devient une priorité.
A contrario, dans les quelques pays qui ont fait le choix de la budgétisation et ont délaissé le financement de leur audiovisuel public par une taxe affectée, leur délitement est rapidement arrivé, avec le train des économies et parfois des attaques contre l’indépendance et la liberté, portées par l’extrême droite quand elle est au pouvoir.
Sur l’ensemble de ces points, de ces travaux, nous n’avons été pour l’instant ni écoutés ni entendus par le Président de la République et son Gouvernement.
Aujourd’hui, au-delà de nos différences, nous, salarié·es, journalistes, autrices et auteurs, réalisatrices et réalisateurs, responsables de structures de production et de diffusion refusons, que le nécessaire débat sur l’audiovisuel public et son financement soit confisqué et escamoté au détour d’un projet de loi de finances rectificatif au cœur de l’été et au profit d’un tour de passe-passe budgétaire.
Il n’est pas raisonnable d’improviser ni de préempter l’avenir du service public de l’audiovisuel sans qu’une réflexion approfondie n’existe, sans que les forces vives de ce pays, sans que les parlementaires, n’aient le temps de participer à une réelle concertation et à un débat commun.
Un débat qui porte sur les missions de service public, le besoin de conforter et de développer les œuvres et programmes que nous concevons, fabriquons et diffusons pour et sur nos services publics.
Un débat qui porte sur l’indépendance et sur les enjeux de diversité culturelle et d’information.
Un débat qui porte sur la démocratie et le rôle que doit jouer en sa faveur l’audiovisuel public et tout l’écosystème dont nous sommes les actrices et acteurs.
Un débat qui porte sur un financement public, qui garantisse la justice fiscale et un rendement dynamique.
Nous exigeons ce vaste débat public à la rentrée de septembre, plutôt qu’un passage en force en plein mois d’août.
Un débat public, citoyen, essentiel, républicain.
Parmi les premiers signataires
David André, réalisateur
Feurat Alani, journaliste, écrivain
Laura Alcoba, écrivaine
Yann Arthus-Bertrand, réalisateur
Thaddee Bertrand, monteur
Julie Bertuccelli, cinéaste, présidente de la Cinémathèque du Documentaire
Lise Blanchet, journaliste,
Jean-Pierre Bloc, monteur
Hervé Brusini, journaliste, président du Prix Albert Londres
Gilles Cayatte, réalisateur
Matthieu Chatelier, réalisateur
Catherine Clément, écrivaine, philosophe
Seb Coupy, réalisateur
Mathilde Damoisel, réalisatrice
Florence Dauchez, journaliste
Jean-François Delassus, écrivain
Leila Djitli, journaliste et réalisatrice,
Amalia Escriva, réalisatrice
Marc Faye, réalisateur
Colette Fellous, écrivaine, productrice radio
Anne Georget, réalisatrice, présidente du Fipadoc
Nicolas Glimois, réalisateur
Pascal Goblot, réalisateur
Tania Goldenberg, réalisatrice
Jacques Graf, photographe,
Geneviève Guicheney, journaliste
Danielle Jaeggi, réalisatrice
Isabelle Jarry, écrivain
Patrick Jeudy, réalisateur
Elisabeth Kapnist, réalisatrice
Samy Ketz, journaliste AFP
Baudouin Koenig, réalisateur
Rémi Lainé, réalisateur, président de la Scam
Roméo Langlois, journaliste France 24
Georgi Lazarevski, réalisateur
Karine Le Bail, chercheuse CNRS, productrice radio
Gwen Le Gouil, journaliste
Thomas Legrand, journaliste éditorialiste France Inter
Sébastien Lifschitz, réalisateur
Virginir Linhart, réalisatrice
Marie Maffre, réalisatrice
Marie Mandy, réalisatrice
Alexis Marant, réalisateur
Jean-Paul Mari, journaliste
Xavier Marquis, auteur réalisateur,
Claudia Marschal, réalisatrice
Laëtitia Moreau, réalisatrice
Emmanuel Moreau, journaliste,
Anita Perez, monteuse
Rithy Panh, réalisateur
Jean-Pierre Perrin, journaliste, écrivain
Nicolas Philibert, réalisateur
Anne Poiret, réalisatrice
Jean-Claude Pomonti, journaliste, écrivain
Jérôme Prieur, réalisateur
Philippe Pujol, journaliste, écrivain
Tania Rakhmanova, réalisatrice
Isabelle Rey, autrice,
Philippe Rochot, journaliste
Françoise Romand, réalisatrice
Marie-Monique Robin, réalisatrice
Hervé Rony, directeur général de la Scam
Bertrand Rosenthal, journaliste,
Christian Rosset, producteur de création radiophonique
Patrick de Saint-Exupéry, journaliste
Marie-Pierre Samitier, journaliste
Nathalie Sapena, journaliste
Guy Seligmann, réalisateur, ancien président de la Scam,
Caroline Swysen, réalisatrice
Frédéric Tonolli, réalisateur
Charlotte Tourres, monteuse
Anja Unger, réalisatrice
Bénédicte Van der Maar, photographe
Jean-Robert Viallet, réalisateur
Tomas Van Houtryve, photographe,
Tristan Waleckx, journaliste
Olivier Weber, écrivain, journaliste
Ruth Zilbermann, réalisatrice
Josianne Zardoya, réalisatrice