La mention est trop connue chez les reporters : « il a été tué, il ne faisait que son métier ». Frédéric Leclerc-Imhoff de la rédaction de BFM-TV a été mortellement blessé alors « qu’il était à bord d’un bus, humanitaire, aux côtés de civils contraints de fuir pour échapper aux bombes russes. » dit le communiqué officiel de l’Élysée.
Le Prix Albert Londres adresse toutes ses condoléances à la famille de notre confère, de même qu’à la rédaction de BFM.
La guerre en Ukraine a déjà fait des milliers de morts, parmi les militaires, parmi les civils de tous âges… Nous la suivons presqu’en temps réel, comme rarement ce fut le cas. Des hommes et des femmes de terrain, engagées dans ce témoignage au long cours assurent cette permanence de l’information. La mort de notre confrère rappelle que « raconter la guerre » peut se faire au prix de la vie. Un prix toujours trop cher à payer.
Tic tac tic tac… Parmi les journalistes présélectionnés ci-après, qui va succéder à Allan Kaval, Cédric Gras, Sylvain Louvet et Ludovic Gaillard ?… Fin du suspense lundi 15 novembre à 18 heures en direct de la BnF.
Retransmission de la remise des prix Albert Londres 2021 en direct de la BnF :
Margaux Benn – Le Figaro
Zineb Dryef – M le magazine du Monde
Wilson Fache – Libération / Causette
Ghazal Golshiri Esfahani – Le Monde
Caroline Hayek – L’Orient-Le Jour
Louis Imbert – Le Monde
Josiane Kouagheu – Le Monde Afrique
Willy Le Devin – Libération
Léna Mauger – XXI
Nicolas Ducrot – Pour ne pas les oublier (France 3, Babel doc – 66’)
Bryan Carter – Les Routes de la discorde (RTBF, Pokitin productions – 62’)
Alex Gohari et Léo Mattei – On the line, les expulsés de l’Amérique (France 2, Public Sénat, Brotherfilms– 68’)
Jules Giraudat – Projet cartel-Mexique, le silence ou la mort (France 5, Forbidden films – 73’)
Céline Rouzet – 140km à l’ouest du paradis (BE ciné, Reboot films – 86’)
Solène Chalvon-Fioriti et Margaux Benn – Vivre en pays taliban (Arte, Caravelle – 36’)
Valentin Gendrot – Flic, un journaliste a infiltré la police (Editions Goutte d’or)
Emilienne Malfatto – Les Serpents viendront pour toi (Les Arènes Reporters)
Antoine Mariotti – La Honte de l’Occident (Editions Tallandier)
Sébastien Philippe et Tomas Statius – Toxique (Puf – Disclose)
En vidéo
Laurence Engel, présidente de la BnF
Hervé Brusini, président du Prix Albert Londres
La loi de 1881 est souvent méconnue. Elle structure pourtant sur des points essentiels la liberté d’expression. 140 ans plus tard, elle est encore au cœur de débats, comme par exemple la liberté ou non de filmer les forces de l’ordre lors des manifestations. Ou encore la question des relations avec le pouvoir, récurrente tant en France qu’aux États-Unis où de Trump à Biden, les médias ont vécu et vivent encore sous tension. Sans oublier les dérives de la technologie numérique dont l’affaire Pegasus est la parfaite illustration de l’intrusion à grande échelle pour qui peut se payer un logiciel capable de renseigner, espionner, bloquer le travail d’enquête des journalistes.
Dès son apparition, en France, l’information de masse a été abondamment critiquée, considérée comme une offre dépourvue de qualité aux yeux des tenants de la presse d’opinion politique et artistique. Puis on l’accusa de mettre le sang à la Une pour multiplier les ventes. On pointa les fausses nouvelles, la corruption, le chantage des journalistes… En 1918 une première charte déontologique fut l’une des réponses fortes adressées par le monde de l’information à une opinion qui ne lui faisait plus confiance. Aujourd’hui, on mesure les hauts et surtout les bas de la crédibilité accordée aux médias. Pourquoi cette dégradation (variable selon les supports) mais qui semble globalement inéluctable ? Comment y remédier en France et aux Etats-Unis ?
D’emblée, l’information de masse a été l’apanage d’entrepreneurs. Politiques, capitaines d’industrie, ou patrons de presse, ils furent à la naissance de « la grande presse ». Et la question n’a cessé de tarauder l’info : Jusqu’où cette origine capitaliste permet-elle l’exercice d’une liberté de l’information ? La crise du groupe Lagardère est un exemple parmi tant d’autres. Et surtout le monde numérique et les Gafam constituent la toile de fond de cette redoutable question.
« Fausse nouvelle », c’est ainsi que l’on parlait d’infox en 1881. Les débats furent nourris à ce sujet à l’assemblée nationale. De fait, l’histoire a inventorié depuis l’antiquité grecque, en passant par la royauté française ou même la révolution, de grands « artistes » de la fausse information. Aujourd’hui, la question semble être passée au stade industriel. Des factory à déstabilisation semblent agir massivement et violemment dans les rapports entre États. De plus, une part importante des citoyens du monde semble avoir basculé dans le complotisme. La fascination pour le mystérieux le plus irrationnel emporte nombre d’esprits. Et la vérité de se retrouver au cœur des questions posées au journalisme.
Ils n’ont pas attendu 1881, mais cette loi a accompagné l’émergence d’un art majeur de faire l’info, le reportage. Des figures de femmes ont promu les fondements mêmes du reportage. Récits de voyage, immersion, investigation, dénonciation… Des deux côtés de l’atlantique, ces femmes se sont engagées, corps et âme pourrait- on dire, dans la grande narration des choses de l’existence, nourrissant ainsi la vie démocratique. Qu’en est-il aujourd’hui ? Quid de leurs conditions professionnelles et salariales ? Et plus globalement, où en est cette pratique du reportage ? Les éditeurs répondent-ils toujours présents à l’appel ? Peut-on en vivre ? A-t-il toujours son utilité dans un monde d’images instantanées, sur une planète où chacun parle de soi sur sa chaîne d’information personnelle ? France et Etats-Unis sont encore une fois logés à la même enseigne.
Colloque Prix Albert Londres
Une journée pour réfléchir, apprendre, débattre sur les questions qui agitent et bousculent le journalisme, autrement dit, plonger la plume dans nos propres plaies… Un débat nourri à la fois des expériences passées grâce aux archives et du regard d’au-delà nos frontières avec les confrères du Prix Pulitzer. Avec et depuis la loi de 1881, l’information est une question aux multiples visages.