La Scam, avec le concours de la SGDL, publie son huitième baromètre des relations auteurs/éditeurs. 1 086 auteurs et autrices ont répondu à ce questionnaire en ligne.
Une attention particulière a été portée aux effets du confinement sanitaire sur les relations des auteurs et autrices à leurs éditeurs et éditrices.

EN VIDÉO

Ce 8e baromètre des relations auteurs/éditeurs a été rendu public le 9 mars 2021 lors d’un webinaire organisé en partenariat avec Livres Hebdo et en présence du Syndicat national de l’édition.

L’enquête a été réalisée sur Internet hors période du 1er confinement, du 6 au 25 octobre 2020, auprès de 12 000 autrices et auteurs de l’écrit, membres de la SGDL et/ou de la Scam.
1 086 autrices et auteurs ont répondu à notre enquête, soit un taux de réponse de 9 %.
21 % ont entre 30 et 50 ans.
Plus de la moitié (53 %) est âgée de 51 à 70 ans. 58 % sont des femmes et 42 % des hommes. Les deux tiers des auteurs et autrices qui ont répondu au questionnaire ont un autre métier. Pour un tiers de celles et ceux qui ont un autre métier, cette double casquette professionnelle est une contrainte.

1 – LA RELATION AVEC L’ÉDITEUR

UNE DÉGRADATION

31 % des auteurs estiment avoir des relations non satisfaisantes, voire conflictuelles avec tous leurs éditeurs. Au lieu de baisser, ce taux d’insatisfaction a augmenté de 6 points (24 % en 2018). Cette dégradation des relations auteurs/éditeurs est confirmée par une autre mesure : 32 % des auteurs estiment que la qualité de la relation avec les éditeurs s’est détériorée au cours des trois dernières années. En 2018, ils étaient 29 %. Notons toutefois que près de 11 % des auteurs estiment que la relation avec leurs éditeurs s’est améliorée au cours de ces mêmes trois dernières années et que 22 % des auteurs déclarent vivre des relations excellentes ou satisfaisantes avec tous leurs éditeurs. Un chiffre là aussi en (légère) hausse par rapport à 2018 (20%).

LE TRAVAIL DE L’ÉDITEUR : PEUT MIEUX FAIRE

Quand on demande aux auteurs de noter leurs éditeurs pour leur travail dans les domaines du paiement des droits, de l’offre des contrats, de la création, de la diffusion, de la promotion et de la reddition des comptes, la moyenne de toutes les notes attribuées est de 6 sur 10.

DES AUTEURS QUI FONT EUX-MÊMES LEUR PROMOTION SUR LES RÉSEAUX

Pour cette étape de la vie du livre, 47 % des auteurs estiment qu’elle est principalement le fruit de leur propre travail sur les réseaux sociaux.
La note moyenne attribuée aux éditeurs pour le travail de promotion est de 5 sur 10.

PLUSIEURS ÉDITEURS POUR VIVRE

Seuls un peu moins de 9 % des auteurs n’ont qu’un seul éditeur depuis qu’ils ont commencé leur vie d’écrivain. Une quasi stabilité par rapport aux baromètres de 2018 et 2015.
En 2020, 53 % des auteurs déclarent travailler avec deux à cinq éditeurs ; 23 % avec six à dix éditeurs ; enfin, 14 % ont plus de dix éditeurs différents.

UNE SITUATION FINANCIÈRE QUI CONTINUE À SE DÉGRADER POUR UN AUTEUR SUR DEUX

La situation financière des autrices et des auteurs qui ont répondu à notre enquête s’est, elle aussi, détériorée pour 52 % d’entre eux : une hausse très sensible par rapport à 2018 où ils étaient 44 % à déclarer vivre cette détérioration.
Pour 65 % d’entre eux, les revenus issus de leur activité d’auteur de l’écrit représentent moins de 25 % de leurs revenus annuels : une baisse de cinq points par rapport à 2018.

2 – LES CONTRATS

MIEUX, MAIS TRÈS INSUFFISANT

Tous les auteurs ou presque (96 %) signent des contrats à compte d’éditeur. Plus de 40 % des auteurs ont signé leur dernier contrat en 2020. Plus d’un tiers ont signé leur contrat le plus récent entre 2018 et 2019.
Pour un quart des auteurs et autrices, le dernier contrat signé ne distingue pas clairement l’exploitation papier de l’exploitation numérique. À noter que cette proportion a diminué par rapport à 2018 quand un tiers des auteurs s’en plaignaient.

CONTRATS PAPIER

Une courte majorité (52 %) estime que les contrats pour l’exploitation papier sont toujours clairs et explicites. Un mieux par rapport à 2018 où l’on comptait 47 % de satisfaits. Ils sont encore 15 % à trouver ces contrats peu ou pas clairs et explicites.

CONTRATS NUMÉRIQUES

29 % des auteurs et autrices jugent clairs et explicites les contrats numériques (10 points de plus qu’en 2018), mais cela ne fait toujours qu’un petit tiers de satisfaits.
38 % les jugent, au contraire, encore peu ou pas clairs.
Comme en 2018, les contrats pour une exploitation uniquement numérique sont assez rares, 10 % uniquement.

Des mécanismes d’ajustements inemployés
Dans leur très grande majorité (97 %) les auteurs n’ont pas demandé à bénéficier de la clause de réexamen des conditions économiques de la cession des droits d’exploitation numérique, prévue par les nouveaux contrats depuis le 1er janvier 2015.

BESOIN D’AIDE POUR ÉTUDIER LES CONTRATS

Pour lire et étudier leur contrat, 40 % des auteurs interrogés en 2020 ont sollicité un avis extérieur, quand ils étaient près de la moitié des auteurs à déclarer en 2018 avoir fait appel à une tierce personne.
Si ce recours à un tiers diminue, la place des professionnels dans ce recours augmente :
• 40 % des auteurs ont eu recours à un juriste en 2020 (33 % en 2018)
• 7 % des auteurs ont eu recours à un agent en 2020 (3 % en 2018).
Enfin, près de 60 % des répondants ont fait appel à une société d’auteurs pour les aider dans l’étude de leur contrat en 2020, quand ils n’étaient qu’un tiers en 2018.
Dans la majorité des cas (52 %), et comme en 2018 (53 %) et 2015 (55 %), les éditeurs font signer aux auteurs simultanément un contrat d’adaptation audiovisuelle.
La Scam et la SGDL rappellent que la signature de ce contrat n’est pas une obligation.

3 – LA RÉMUNÉRATION

TOUJOURS À LA PEINE, AVEC DES POURCENTAGES EN BERNE

Les droits d’auteur sont calculés pour la très grande majorité des auteurs et autrices (92 %) sur la base du prix public hors taxe de l’ouvrage papier. Dans les autres cas, la rémunération de l’auteur représente un pourcentage des recettes nettes de l’éditeur (4 %) ou est matérialisée par un forfait (3 %).

UN TAUX DE RÉMUNÉRATION MOYEN DE 8,2% POUR L’EXPLOITATION PAPIER ET UNE MÉDIANE À 8 %

S’il est en grande majorité compris entre 5 et 15 % du prix public hors taxe de l’ouvrage, le taux de rémunération des auteurs mentionné dans leur dernier contrat varie selon la nature du livre.
• En littérature générale, la majorité des contrats (52 %) prévoit un taux de droits d’auteur de 10 à 15 %. Mais 11 % des auteurs et autrices perçoivent moins de 5 % ; 34 % perçoivent de 5 % à 10 % ; 1 % perçoit 15 à 20 % et seulement 2 % perçoivent plus de 20 % !

• Pour les beaux livres, les livres pratiques, les livres jeunesse et les BD, le taux pratiqué le plus courant est de 5 à 10 % pour la moitié des auteurs et autrices.

• Mais pour le livre jeunesse, ils restent plus d’un bon tiers (38 %) à percevoir moins de 5 % ainsi que pour les beaux livres (33 %).

• Dans tous les genres, le taux de rémunération monte très rarement au-dessus de 15 %.

Pour l’exploitation numérique, les taux sont bien plus souvent inférieurs à 5 %.
Mais ils grimpent aussi plus souvent au-dessus de 15 % que pour l’exploitation papier. Par exemple, 25 % des auteurs de littérature générale indiquent que leur dernier contrat prévoit un taux de rémunération de 20 % ou plus pour l’exploitation numérique de leurs œuvres.

En jeunesse, en revanche, ils ne sont que 8 % à dépasser le taux de 20 % quand ils sont encore 32 % à être rémunérés sous la barre des 5 %.
Le taux de rémunération moyen pour l’exploitation numérique est de 11,4 % et la médiane à 10 %.

4 – LES À-VALOIR

PEAU DE CHAGRIN

Un tiers des auteurs déclare ne percevoir aucun à-valoir !
Un chiffre en hausse sensible par rapport à 2018, quand ils étaient déjà un quart à ne pas percevoir d’à-valoir.

44 % seulement des auteurs et autrices indiquent que leurs contrats comportent toujours un à-valoir, une perte de 5 points comparée à 2018.
21 % ne reçoivent que quelquefois un à-valoir (26 % en 2018).

Le montant de l’à-valoir figurant au dernier contrat est compris le plus souvent entre 1 500 et 3 000 euros (37,5 % des répondants). Pour 30,5 %, il est supérieur à 3 000 euros ; pour 32 % il est inférieur à 1 500 euros. Des pourcentages presque stables par rapport à 2018.

5 – LES DROITS DÉRIVÉS

MANQUE DE TRANSPARENCE

• Les deux-tiers des auteurs (66 %) perçoivent une rémunération au titre du droit de prêt en bibliothèque, dont 17 % via la Scam, 70 % via la Sofia et 11 % via les éditeurs.

• Ils sont la moitié (50 %) à avoir perçu des droits de reprographie et 41 % des droits pour la copie privée numérique, dont 22 % via la Scam.

• En matière de gestion collective volontaire, ils sont 17 % à avoir perçu des droits audiovisuels ou radiophoniques (à 62 % via la Scam) et 10 % des droits d’adaptation théâtrale.

6 – LA GESTION COLLECTIVE

DES ENTAILLES DANS LA RÉMUNÉRATION

Le pourcentage des auteurs déclarant avoir perçu des sommes au titre de la gestion collective des droits (prêt en bibliothèque, reprographie, copie privée numérique, adaptation théâtrale, radio ou télévision) est en baisse.

31 % des auteurs (contre 50 % en 2018) ont perçu des droits de reprographie, via un organisme de gestion collective pour la grande majorité d’entre eux (81 %).

Ils ne sont également que 31 % (contre 41 % en 2018) à avoir perçu des droits pour la copie privée numérique.

55 % des auteurs ont perçu une rémunération au titre du droit de prêt en bibliothèque, alors qu’ils étaient 60 % en 2018.

7 – LA REDDITION DES COMPTES

LES MAUVAISES PRATIQUES PERDURENT

Pour 50 % des auteurs, les redditions de comptes ne sont ni claires ni complètes chez aucun de leurs éditeurs. Seuls 15 % des auteurs les jugent claires et 13 % les jugent complètes chez tous leurs éditeurs.

Les auteurs sont, comme en 2018, 57 % à recevoir de tous les éditeurs ou de la majorité d’entre eux, une reddition des comptes au moins annuelle et régulière. Ils sont toujours 12 % à ne jamais en recevoir. Ils sont 60 % à avoir déjà écrit à leur éditeur pour réclamer les redditions de comptes.

UN PAIEMENT DES DROITS PROBLÉMATIQUE

Selon 16 % des auteurs, l’envoi de la reddition n’est pas accompagné ou suivi par le versement des droits dus. Une mauvaise pratique qui, au lieu de disparaître, perdure (ils étaient 15 % en 2018).
Notons cependant que 32 % reçoivent les redditions de comptes de tous leurs éditeurs, et 50 % de la majorité ou de certains de leurs éditeurs.

59 % des auteurs disent avoir déjà écrit à leur éditeur pour réclamer le paiement de leurs droits (41 % parfois ; 15 % à de nombreuses reprises). Ce pourcentage est en baisse (moins 5 points par rapport à 2018), mais il reste extrêmement élevé.
De plus, les auteurs qui ont écrit « à de nombreuses reprises » à leur éditeur depuis début 2019 sont 67 % à avoir réclamé leur paiement plus de trois fois.

Et quand les relations auteurs/éditeurs se tendent, 14 % des auteurs ont utilisé le mécanisme de la mise en demeure en cas de manquement par l’éditeur à ses obligations (reddition des comptes, paiement des droits, exploitation permanente et suivie).
Lorsqu’il y a eu absence de réponse de l’éditeur, ces mises en demeure ont été suivies dans 59 % des cas par une résiliation de contrat.

Résiliation à la suite de laquelle 58 % des auteurs ont eu des difficultés à se faire régler le solde de leurs droits.

8 – LE CONFINEMENT

DES EFFETS À SURVEILLER

La dégradation des relations de certains auteurs avec certains de leurs éditeurs pourrait être due en partie au confinement (du 17 mars au 11 mai 2020). Ces effets devront être mesurés plus finement (confirmés ou infirmés) avec des données récoltées après le deuxième confinement et la fin de l’urgence sanitaire.

Si 90 % des auteurs qui devaient signer un contrat avec un éditeur avant le premier confinement l’ont effectivement signé, 92 % des publications prévues durant ces deux mois ont été reportées par les éditeurs qui ont évidemment tenu compte de la fermeture totale des librairies durant cette période.

13 % des auteurs déclarent que l’un ou l’autre de leur ouvrage a fait l’objet d’une opération numérique pendant le confinement. Ils n’en ont été informés que dans 80 % des cas. Et si les éditeurs ont vendu à prix réduit le livre au format numérique, 74 % de ceux-ci ont demandé l’autorisation de cette baisse à l’auteur. Enfin, presque aucun éditeur n’a demandé à un auteur de renoncer à ses droits d’auteur pendant le confinement.

21 % des auteurs interrogés ont constaté de mauvaises pratiques de leur éditeur après la période de confinement : application de tarif promotionnel sans consultation préalable pour des livres numériques ; report de la sortie de l’ouvrage sans information de l’auteur ; annulation sine die de la publication.
83 % de ces auteurs disent ne pas avoir pu discuter de ces mauvaises pratiques avec leur éditeur.