
26 juin 2024
Élections législatives 2024 : nos priorités pour les auteurs et les autrices
À l’approche des élections législatives, et dans la perspective d’un renouvellement de l’Assemblée nationale, la Scam s’alarme de la fragilisation croissante du secteur culturel dont les enjeux, une fois de plus, semblent ignorés d’une majorité de candidates et candidats.
Le monde de la culture ne peut que s’inquiéter de l’avenir qui se profile. La souveraineté culturelle fonde notre socle commun depuis des siècles, il est capital de la préserver.
Des priorités s’imposent pour réguler et permettre au secteur de la culture et des médias de prospérer.
La préservation de l’audiovisuel public
Les médias audiovisuels publics irriguent la création et répondent à une mission singulière en diffusant informations et savoirs auprès de toutes et tous.
Avec la fin de la contribution citoyenne en 2022, et celle de l’affectation d’une part de TVA au 31 décembre prochain, la question du financement est aujourd’hui laissée sans solution. Il est urgent et primordial d’assurer un moyen de financement pérenne aux antennes publiques : la proposition de loi organique consistant à mettre en place un prélèvement sur recettes, qui devait être examinée fin juin, doit pouvoir parvenir à son terme dès après les échéances électorales.
En outre, l’audiovisuel public fait l’objet de deux projets majeurs parmi les partis candidats aux élections législatives, une fusion pour certains, la privatisation pour d’autres, et son financement est loin d’être stabilisé.
La Scam s’était fermement opposée à la proposition de loi sur l’audiovisuel public qui prévoit de réunir au sein d’une holding France Télévisions, Radio France, l’INA et potentiellement France Médias Monde. Cette réforme ne nous semble pas nécessaire et comporte le risque d’accroître les charges de gestion au moment où les ressources publiques sont en danger.
Quant à la privatisation de France Télévisions et Radio France, elle est évidemment bien plus dangereuse et déstabilisatrice que la fusion. Elle induira une chute des tarifs publicitaires auprès des annonceurs, et donc des recettes publicitaires des chaînes privées, déjà décroissantes, qui affaiblirait l’ensemble de nos diffuseurs audiovisuels. Elle porte en elle un effondrement de la création audiovisuelle et sonore. Rappelons que pour FTV les engagements dans la production audiovisuelle sont de 440 M€ et font travailler des milliers d’auteurs, d’autrices et de techniciennes et techniciens.
Le respect du droit d’auteur à l’ère de l’intelligence artificielle (IA)
Le développement de l’IA générative doit respecter les obligations de transparence et d’autorisation des ayants droit. Protéger nos industries créatives en assurant la fiabilité des contenus et la traçabilité des œuvres protégées qui les ont inspirés, est indispensable.
La Scam souhaite que les pouvoirs publics français soutiennent le meilleur niveau de protection possible pour ses créateurs et créatrices, en permettant l’application des outils de transparence les plus exigeants, dans les suites de l’adoption de l’IA Act à Bruxelles, et les adaptations nécessaires de l’arsenal juridique au niveau européen. C’est seulement à cette condition que les éditeurs d’IA français pourront prospérer dans un environnement juridique sain, assurant le respect des droits des auteurs.
La reconnaissance de la création sonore
Malgré l’essor remarquable du podcast et le vif intérêt du public pour la radio, la création sonore reste le parent pauvre des politiques publiques. Il est urgent de créer un dispositif de soutien pérenne pour le secteur du podcast en France, afin de porter la création française dans un écosystème aujourd’hui menacé par une offre internationale très concurrentielle, et dominé par les plateformes et les contenus anglo-saxons ainsi que par le déploiement non maîtrisé de l’IA.
La Scam milite pour la reconnaissance d’un vrai statut pour l’œuvre sonore, et pour une meilleure définition de l’auteur sonore dans le code de la propriété intellectuelle.
Elle souhaite la création d’un mécanisme de soutien public de toute la chaîne de création, et une obligation pour les diffuseurs de financer en partie des créations sonores originales et indépendantes.
Sur le plan européen enfin, il est nécessaire de soutenir la régulation du média sonore à l’instar des médias audiovisuels, et de rendre éligibles les créations sonores aux aides attribuées par l’Union européenne.
L’évolution de la carte de presse
Trop de journalistes audiovisuels indépendants ne bénéficient pas d’une carte de presse en raison de la nature de leurs revenus. C’est un outil vital pour l’exercice de leur métier sur le terrain.
Le Scam préconise une évolution du fonctionnement de la commission qui attribue la carte de presse (CCIJP) pour faciliter le travail des instances d’examens. Il conviendrait d’opérer deux couloirs/formulaires distincts, assortis d’une période de délivrance propre à chacun :
Celui des journalistes-salariés (CDI/CDD/Pigistes) qui fourniraient, comme actuellement et sans changement, les éléments justifiant de leur activité professionnelle.
Celui des journalistes « indépendants » qui fourniraient la preuve que leurs revenus sont issus majoritairement de leur activité journalistique.
Les pouvoirs publics devront assurer les adaptations réglementaires et législatives qui permettront à cette commission professionnelle d’agir en ce sens.
Une rémunération juste et équitable pour les autrices et auteurs du livre
Les principales organisations professionnelles au sein du Conseil Permanent des Écrivains (CPE) négocient depuis de longues années avec le Syndicat National de l’Édition (SNE). Si la France bénéficie d’un important réseau de librairies indépendantes grâce à la loi sur le prix unique, la situation des autrices et auteurs de l’écrit reste précaire, et un manque de transparence est à déplorer.
La Scam souhaite que l’accord CPE/SNE signé en décembre 2023 (reddition des comptes deux fois par an ; obligation d’information incombant à l’éditeur en cas de sous-cession des droits d’exploitation ; résiliation du contrat de traduction en cas de « disparition » du contrat de cession de l’œuvre première…) soit transposé dans la loi.
Elle demande également une réforme du cadre normatif du contrat d’édition pour un meilleur partage de la valeur, une rémunération minimale pour l’auteur de 10% du prix du livre hors taxe et la progressivité des taux de rémunération pour l’associer au succès de ses œuvres.
Face aux programmes vantant, sans autre souci que la marchandisation et le profit immédiat, la libéralisation des filières culturelles françaises, et en particulier des groupes audiovisuels du service public, la Scam rappelle que leur poids économique (45,3 milliards d’euros en 2021, soit 2% du PIB) est en grande partie lié aux mesures souveraines qui les ont préservés jusqu’à présent des règles et des excès du marché.
Brader cette économie saine et prospère au profit d’idéologies globalisantes, au moment où notre pays traverse une période d’incertitude majeure, est-ce une bonne idée ?
Contact presse : presse@scam.fr – 01 56 69 64 34