À vos agendas ! La remise du Prix Émergences se tiendra mercredi 20 décembre 2023 à 19h au CentQuatre-Paris, Salon de L’Incubateur. La soirée sera animée par Pascal Goblot (président de la commission des Écritures et formes émergentes de la Scam).

Les films et projets de résidences finalistes

Mémoire morte
Quentin Sombsthay

28’58 – 2021 – LA FÉMIS

Quentin a découvert un disque dur appartenant à un adolescent qu’il ne connaît pas. Les discussions MSN et les photos qu’il contient vont l’amener à réfléchir sur la mémoire numérique et les traces que nous laissons.

Projet de résidence
Image latente

Au Kenya, une entreprise américaine exploite des centaines de travailleurs pour améliorer les IA. Payés 2 $ de l’heure, ils lisent des extraits de textes contenant des descriptions allant de la torture à l’inceste afin de construire la barrière morale de ChatGPT. Le film traite des visions récurrentes dont ils souffrent depuis la lecture de ces textes.

Le Colloque des Chiens
Norman Nedellec

22’56 – 2023 – LE FRESNOY

Le Colloque des Chiens est une adaptation cinématographique d’une nouvelle éponyme écrite par Cervantès en 1613. Ainsi, deux chiens sont touchés par le pouvoir de la parole, une nuit, aux abords d’un hôpital. Ensemble, ils philosophent sur leur condition canine et s’aventurent sur le récit d’un souvenir – et d’une métaphore politique – pastoral : de celui d’un loup menaçant le troupeau de brebis. Tournés en prises de vues réelles, les enjeux du film étaient de parvenir à donner une intériorité concrète aux chiens, en faisant résonner leur voix dans le contemporain. Par le montage de la voix, d’images documentaires liées à leur propos, et d’images d’archives jouant du souvenir berger, un espace fictionnel prend corps dans la rumeur du loup. Irréel jusqu’au bout du conte, il est animé en 3D et composé à même les images, traversant le film comme un fantôme revenant hanter notre monde.

Projet de résidence
Chalufy

Il est 21h sur le col de Chalufy, la lumière décline. Le berger envoie ses chiens réunir le troupeau. Ils courent sur le flanc de la montagne. Les brebis forment une masse blanche qui sonne et se meut sous les nuages roses orangés du crépuscule. La lune les regarde, isolée dans l’horizon à perte de vue. Le troupeau passe proche, le son des cloches s’intensifie avant de laisser place au langage des grillons. Un patou m’aperçoit, vient à ma rencontre en aboyant. Passant sur une crête, son corps se dessine en contre-jour du ciel. Il me sent, s’apaise, et me guide à la suite du troupeau pour nous ramener tous à la cabane. Dans cette balade entre chien et loup, sa forme blanche devient le repère de la marche. Plus la nuit s’installe et plus son corps devient abstrait, comme un nuage, un fantôme ou une pâle lumière dans l’obscurité. Il devient abstrait au milieu des grillons et des étoiles.

Play me, I’m yours
Julia Palmieri Mattison

14’31 – 2021 – ERG

Play me I’m yours est un court-métrage documentaire expérimental réalisé à l’École de recherche graphique à Bruxelles durant mon master de Narration Spéculative en 2021. Alliance d’images d’archives, de papiers scannés et de notes crachées sur des Post-it, il fait discuter plusieurs générations, questionnant la porosité des relations amoureuses, familiales et amicales. «Autour d’un repas bruyant, dans un lit où on partageait un paquet de gâteaux, la discussion pendant que tu te lavais, je préparais à manger et ma mère venait d’acheter un bouquet de fleurs à mettre sur le piano du salon. Tu n’aurais jamais dû baiser avec lui, elle a si bien fait de coucher avec elle. Je t’appelle demain pour qu’on en discute, je dois téléphoner à ma grand- mère avant. L’amitié, l’amour, la famille, les relations, les interactions, la mort, les femmes, les hommes, la nourriture, ça regroupe, ça divise et c’est poreux.»

Projet de résidence
Looking mean is not cool anymore

Looking mean is not cool anymore est un court-métrage documentaire expérimental, une expérience sociale. Son décors joue un rôle narratif crucial nécessitant un terrain d’expérimentation propre, un lieu de tests, en parallèle de l’écriture formelle. Une résidence me donnerait accès à cet espace de réflexion, de tentative, loin de mon appartement-atelier solitaire. Elle me permettrait de fusionner les mots aux objets, aux audios, aux dialogues, à l’esthétique générale du film. Et ce, dans l’optique de parfaire et dessiner la complémentarité et la résonance du visuel et de la narration. Il s’agit de trouver de nouvelles manières de faire cohabiter le propos du film et son esthétique, les rendant interdépendants. Ce sera l’objet de cette résidence. Trouver son équilibre esthétique, en trouvant les éléments justes, du simple document scanné à l’intégration 3D.

Plein air
Jérémie Danon

26’31 – 2021 – ENSBA Paris

Plein air met en scène des individus en réinsertion. Sortis du milieu carcéral, ils se retrouvent aujourd’hui dans une liberté différente de celle qu’ils ont connue avant leur détention. Transformés par l’expérience de la captivité, ils portent un regard nouveau sur ce monde retrouvé. J’ai invité cinq anciens détenus à prendre la parole sur un fond vert ; ce dispositif permet de présenter leurs témoignages tout en les décontextualisant de la réalité, au moyen d’espaces imaginaires. De l’univers mythopoétique de Falkreath The Elder Scrolls à celui de GTA V, ces décors de synthèse tirés de jeux vidéo ont été choisis d’après leurs réponses à la question : « où aimerais-tu être maintenant ? ». Au milieu de ces espaces machinima, ils témoignent du décalage et de l’impossible retour à la réalité qu’ils éprouvent.

Projet de résidence
Mothers

Mothers a pour sujet la ballroom scene. A contre-pied des rares documentaires qui ont vu le jour sur cette culture, je souhaite m’intéresser aux personnes qui sont au cœur de la ballroom scene sans jamais filmer un ball (compétition de voguing célébrant toutes les identités). Au lieu de montrer le lieu du ball et les performances qui s’y déroulent, je montrerai l’avant et l’après de cet événement pour évoquer ce qui ne doit pas être montré. Tout ici est question d’espace : espace de cinéma, espace de parole, espace de sécurité et espace de légitimité. Je veux donner aux protagonistes de cette histoire la possibilité de se mettre en scène, non pas à la manière d’un ball mais avec les outils du cinéma, pour questionner ensemble cet univers qui leur appartient. Je souhaite faire une œuvre sur la ballroom scene avec les personnes qui la font exister et que cette œuvre soit collective.

Forensickness
Chloé Galibert-Laîné

40’17 – 2021 – ENS (École normale supérieure)

Après avoir vu le film Watching the Detectives de Chris Kennedy, une chercheuse retrace la chasse à l’homme menée sur le forum reddit.com après les attentats terroristes de 2013 à Boston. Examinant des extraits de journaux de l’époque ainsi que des réinterprétations fictionnelles des événements, elle compare les manières dont agents du FBI, journalistes et internautes ont analysé la masse d’images amateurs qui ont mené à l’identification des terroristes. A mesure qu’elle se laisse fasciner par le spectacle de l’affrontement entre leurs différentes formes d’expertise et d’autorité, elle-même perd progressivement de vue l’écart entre ce que les images montrent véritablement, et ce qu’elle veut voir en elles.

Projet de résidence
La Grande Vacance

La Grande Vacance est un essai de recherche audiovisuel sur les images de l’épuisement, et sur l’épuisement par les images. Prenant pour point de départ une vidéo trouvée sur la plateforme de streaming en ligne Twitch, qui montre un internaute se filmant en train de dormir afin de monétiser son temps de repos, le film mène une enquête critique sur l’articulation contemporaine entre fatigue, (auto)exploitation, et pratiques des écrans connectés. Faisant le lien entre l’épuisement individuel et la surconsommation des ressources de la planète, la résidence sera spécifiquement consacrée au travail de mise en scène des archives audiovisuelles qui constituent la matière première du film – des archives remédiatisées, transférées, altérées, corrompues peut-être, invitant une réflexion sur les écologies numériques à venir et l’archivage d’internet.

Le jury

Il est composé de Ludovic B. (vidéaste, membre commission des Écritures et formes émergentes de la Scam), Jean-Marc Chapoulie (réalisateur, membre commission des Écritures et formes émergentes de la Scam), Julie Sanerot (CentQuatre-Paris), Karim Ben Khelifa (lauréat Prix Nouvelles écritures 2022 pour Seven Grams), Jean Gégout (lauréat Prix Émergences 2022, pour Omi-Maiko Station)

Les lauréats et lauréates des années précédentes

Jean Gégout (2022)
Nicolas Gourault (2021)
Gabrielle Stemmer (2020)
Marin Martinie (2019)
Ismaël Joffroy Chandoutis (2018)
Ugo Arsac et Hannah Hummel (2017)

Le Prix Émergences est doté de 6 000 € : 3 000 € par la Scam en récompense d’un film d’école, et 3 000 € par le fonds de dotation EDIS pour une résidence (au CentQuatre-Paris et/ou à l’Ardenome d’Avignon). Le prix est soutenu par l’AndÉa. Il a pour but de stimuler et de soutenir la nouvelle création. Le Prix Émergences propose aux jeunes auteurs et autrices étudiants·es en fin d’études, sortant des écoles d’art, d’audiovisuel et des établissements d’enseignement supérieur, de présenter un film personnel à caractère expérimental, réalisé dans le cadre de leur année diplômante, ainsi qu’un projet d’œuvre numérique en devenir, à réaliser lors de leur résidence.

En partenariat avec le CentQuatre-Paris et le fonds de dotation EDIS, soutenu par l’ANdÉA.

Contact

Caroline Chatriot – prixemergences@scam.fr