Sommaire

> Publicité, télévision et service public par Philippe Pilard
> Coopération renforcée entre la Sacd et la Scam
> Quand la culture éternue, la France s’enrhume-t-elle ? par Antoine Perraud
> Appels à candidature
> Des comptes et des contrats
> Copie privée
: fin du répit
> Réagissez !
> Fiche juridique
: L’AMAPA, le recours à la médiation ou à l’arbitrage

L’édito du président
« Complémentarités » par Guy Seligmann

« La religion est complémentaire de la laïcité » a déclaré récemment le président de la République pour clore une controverse toujours vive, provoquée par ses discours prononcés à Dubaï et à Rome (Latran). Ce point de vue est inexact et dangereux parce que contradictoire. Inexact parce que la laïcité est une et indivisible tout comme la
République. Rien ne peut lui être complémentaire, c’est comme si l’on affirmait que la Monarchie est complémentaire de la République, le divorce du mariage, ou bien encore la foi de l’athéisme.
On peut individuellement être monarchiste ou croyant. Ce sont là des convictions intimes, respectées et protégées par la République qui ne peuvent en aucun cas en être des compléments. La République n’en a pas besoin. Son unicité et son indivisibilité suffisent à sa propre intégrité. Il est dangereux de vouloir ainsi la compléter, elle en est atteinte aussitôt, tout comme la laïcité. Il en va de même, mais à l’inverse du droit d’auteur, un et indivisible, créé par Beaumarchais et voté dès 1792 au moment où nait la République car ce qui lui est essentiellement complémentaire c’est sa rémunération. C’est précisément pourquoi c’est elle, la rémunération, qui est attaquée de toutes parts en ce moment; en la contestant c’est le droit d’auteur que l’on espère ainsi mettre à bas, à bas prix. Le numérique multiplie les modes d’exploitation, tous les auteurs sont maintenant « multimedia » : réalisateurs, écrivains et scénaristes, journalistes, photographes, dessinateurs, pour ne citer que ceux-là : leurs œuvres circulent et circuleront de plus en plus à cause de leur diffusion numérique. Il est donc essentiel au droit d’auteur qu’il soit équitablement rémunéré sinon c’est son existence même qui sera contestée. Pour une fois, l’exemple nous est venu du pays du copyright, les Etats-Unis, grâce à la grève des scénaristes.
C’est bien en revendiquant et en obtenant un pourcentage sur les recettes générées par les nouveaux modes d’exploitation numérique que les auteurs d’Hollywood ont affirmé leur statut d’auteur.
Il serait paradoxal qu’en France et en Europe ce statut soit contesté au moment où au royaume du copyright on le reconnait de facto. Autre complémentarité : il n’y aura pas de suppression des écrans publicitaires du service public sans de sérieuses propositions d’un nouveau financement.
La composition de la commission Copé nous laisse de ce point de vue déconcertés. Y siègent en majorité des producteurs ou leurs représentants, les créateurs en ont été exclus. C’est pourquoi, nous, la Sacd et la Scam, avons proposé dès la mise en place de cette commission, puisque le président de la République avait déclaré que la composition de la commission était encore ouverte, deux noms d’auteurs-réalisateurs, pour nous y représenter. La réponse de Jean-François Copé a été négative. On ne peut que s’en inquiéter car il est choquant que, tout comme les représentants du personnel de France Télévisions, les représentants des créateurs soient d’ores et déjà exclus de cette commission de réflexion sur l’avenir économique et intellectuel – le contenu du cahier des charges de notre service public de télévision -. Même si deux femmes, Sophie Deschamps, ancienne présidente de la Sacd, et Catherine Clément, administratrice de la Scam, en font partie avec Jacques Santamaria, leur voix risque d’avoir du mal à se faire entendre, -on connaît pourtant leur pugnacité- au sein d’une commission ainsi composée arbitrairement, précipitamment et sans aucune consultation des organisations professionnelles représentatives des créateurs.
Complémentarité enfin, effet de la signature de l’accord de collaboration entre la Scam et la Sacd, car nous agissons ensemble pour mener les négociations et nous nous sommes très vite accordés pour que deux documentaristes nous représentent au sein de la commission compte tenu du fait que les trois heures quotidiennes de programmes supplémentaires créées par le vide des écrans publicitaires seront essentiellement documentaires.
En ces temps d’agitation cette complémentarité est de bon augure.