La dernière session du Prix Mentor 2024 s’est déroulée dans nos murs et a consacré Zoé Bernardi, coup de cœur du jury pour Mon héritage et Matthieu Marre, coup de cœur du public pour Hypnose.
Rendez-vous le 12 décembre à la Scam pour la Finale !

Tel un incubateur, l’objectif du Prix Mentor est de fournir au lauréat ou à la lauréate les meilleures conditions au développement d’un projet qui utilise la photographie comme médium source. Il se présente sous deux formes : un soutien financier et un accompagnement personnalisé par un groupe d’experts. Organisé par FreeLens, il est soutenu par la Scam et le CFPJ Médias.
Les sept photographes sélectionnés
- Zoé Bernardi, Mon Héritage
- Oleñka Carrasco, Maison prêtée pour un deuil
- Chau-Cuong Lê, Dans l’épaisseur fragile des Neuf Croix
- Léonor Lumineau, Fashion Monsters
- Matthieu Marre, Hypnose
- Mila Nijinsky, Costumes de chairs
- Vanda Spengler, Bestiaire d’un été
Le jury était composé de
- Martin Barzilai, photographe, auteur, enseignant
- Sylvie Hugues, directrice Festival du regard
- Steven Wassenaar, photographe, commission Images fixes de La Scam
- Gaëlle Abravanel, photographe, administratrice Freelens
- Églantine Aubry, curatrice, scénographe, accompagnatrice de projets photos
Pendant les délibérations, Sandra Reinflet, présidente de la Commissions des Images Fixes, et Alexis Kerzerho, juriste de la Scam ont échangé sur Droit d’auteur et photographie : comprendre ce qu’on ne nous apprend pas.

Mon héritage de Zoé Bernardi

Mon Héritage, entamée durant le premier confinement, est d’abord née de la nécessité de nommer ce qui constituait, pour moi, famille : j’ai commencé à photographier mon père, un vieux
hippie, ma mère, une ex-punk, mon beau-père, un ancien forain, et ma grand-mère, une petite vieille aux cheveux roses. Pendant 5 ans j’ai observé comment de notre marginalité située nous faisons un chant d’amour universel. Pudeur et extravertie, allègre et dramatique, je fais l’inventaire de tous les gestes, couleurs, motifs et visages qui constituent notre quotidien. Comment trouver ma place, dont le credo du « no future » a été contredit par ma propre existence ? Qu’est-ce qui « fait famille », et où est la limite avec la communauté ? Performance d’équilibriste entre jeux de mises en scènes et l’enjeu de ne pas céder au spectaculaire de ce qu’ils sont : des « personnages qui performent leur propre existence ».
Je termine un cursus de 5 années aux Beaux-Arts de Paris, dont je sors félicitée de l’atelier de Valérie Jouve et Agnès Geoffroy. Je m’attelle à montrer la puissance de la singularité, et comment la marginalité s’articule en miroir de la norme en utilisant l’intimité comme lieu d’expérimentation. J’ai eu le plaisir d’exposer à Photo Saint Germain, au Centre Culturel Jean Cocteau, à la Fondation Ricard et au Palais de Tokyo. Depuis 2024, je suis résidente aux ateliers Wonder.
Hypnose de Matthieu Marre

Hypnose est un projet de livre. C’est le fruit d’un important travail de laboratoire. Des tirages sur papiers anciens qui, indépendamment du plaisir ludique et esthétique que leur usage m’apporte, ajoutent une nouvelle lecture aux images, une entrouverture, une fêlure, que je guette à la prise de vue, comme au développement ou au tirage. Ce que je recherche en photographie tangue entre le mystère et l’amour. Cela se traduit par une sorte de mystique de la photographie. . Mystère de l’ordre du monde. Mystère du silence en soi. Mystère du lien. Le projet est toujours le même : celui d’une improbable élucidation. « Chacun de nous ne parle qu’une seule phrase, que seule la mort peut interrompre » (Barthes citant un confrère). Alors je cherche inlassablement les termes de cette phrase dans les images que mon appareil produit.
Je suis né dans le Lot. J’ai été très marqué par la poésie du lieu. Un voyage à 20 ans où je découvre la photographie et son étonnant pouvoir d’ancrage. Puis des études d’anthropologie axées sur la mort avec un master sur les soins palliatifs. Une photographie marquée par une nécessité de rendre compte d’une frontalité du réel en prenant en compte l’implication de l’observateur, dérivant au fil des années vers une photographie explorant un autre type de réalité, celle des songes, des choses dissimulées dans les plis de la psyché, de leur possible réification dans la banalité de l’image photographique.