La Scam a publié un plaidoyer pour un fonds des nouvelles écritures sonores qu’elle a transmis au ministère de la Culture pour qu’il s’en empare. Un article de Karine Le Bail, historienne, productrice et administratrice Scam, pour la lettre Astérisque n°62.

La radiophonie repose sur une double fascination : espace infini de la prose du monde – la logosphère que décrivait le philosophe Gaston Bachelard –, elle est aussi le lieu d’une délectation du ouïr et d’une possible réécriture poétique. 

Le rappel de cette dualité, à l’heure où l’on parle toujours plus des horizons ouverts par le « média global », s’impose comme un programme à bâtir. Comment maintenir autrement l’idée que la radio n’est pas que pur moyen de transmission mais s’offre encore et plus que jamais comme un médium privilégié pour diffuser les principes de la rêverie, comme l’avançait Bachelard ? Cette idée qu’il existe bien un art radiophonique, espace d’une création autonome, a donné naissance à quelques programmes mythiques.

Hier le Studio d’essai de la radio fondé en 1943 par Pierre Schaeffer, matrice du fameux Service de la Recherche de l’ORTF, devenu dans le foisonnant après-guerre le Club d’essai, que son directeur le poète Jean Tardieu appelait « la maison onirique » ; plus près de nous, les Atelier de création radiophonique et autres Nuits magnétiques sur France Culture ; regardant vers demain, les radios hertziennes et numériques, les plateformes de podcast et les festivals qui continuent d’expérimenter toutes les possibilités techniques et expressives qu’offre le micro pour poser les bases d’un renouvellement des genres et des styles radiophoniques.

Chaque année, les sociétés d’auteurs dont la Scam s’engagent pour encourager cette radio de création au travers de bourses et de prix qui accompagnent les auteurs et les autrices dans l’écriture de leurs projets. Ce soutien fait partie de leur mission et en retour, elles y rencontrent leur raison d’être. Reste que ces divers appuis sont très largement insuffisants au regard des attentes d’un secteur en pleine ébullition.

La radio, seul art qui ne soit pas aidé en propre par la puissance publique, pourrait dès lors trouver dans un Fonds de création sonore porté par le ministère de la Culture le soutien nécessaire pour continuer d’inventer l’avenir.

Car c’est peu de dire que cette radio récréative, au sens de la recreatio – qui signifie ensemble produire du nouveau et du réconfort – a de beaux lendemains devant elle. Car, sans chercher nullement à s’opposer à la puissance de l’image, elle redonne force au pouvoir d’évocation du sonore – cette porte ouverte sur l’imaginaire. 

Puis elle est, avec la musique, cet art d’un même temps partagé, donnant à expérimenter un présent vivant et porteur de lien social. Elle est, enfin, celle qui rechigne aux seules logiques de flux pour offrir aux publics un espace tiers de vagabondage et de réflexion citoyenne.

 

Lien vers le plaidoyer

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