La 3e table ronde du colloque « Auteursdevue » consacrée aux perspectives des politiques culturelles à l’horizon des présidentielles de 2012. Une rencontre présentée par Catherine Clément et animée par Frédéric Taddéï, en présence de Patrick Bloche, Jean-François Copé, Pierre Laurent, Catherine Morin-Desailly et Hervé Rony.

* Demandez le programme ! Les perspectives culturelles de la France à l’horizon 2012
Il fut un temps où l’on n’imaginait pas une campagne présidentielle sans que les candidats, tous les candidats, ne soient interrogés publiquement sur leur politique culturelle. Il n’est pas trop tôt pour bien faire. Recommençons !
Interrogeons ceux qui cherchent nos suffrages et voyons ce qu’ils nous proposent.
Nous aurons des surprises et d’ailleurs, eux aussi.
Catherine Clément

Une rencontre présentée par Catherine Clément et animée par Frédéric Taddéï
en présence notamment de Patrick Bloche (député du PS),
Jean-François Copé
(secrétaire général de l’UMP),
Pierre Laurent
(secrétaire national du PCF),
Catherine Morin-Desailly (sénatrice, Union centriste),
Hervé Rony (directeur général de la Scam).

2012, Demandez le programme ! par La_Scam
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A un an des élections présidentielles, la Scam a interrogé quatre représentants politiques sur leur programme culturel: Patrick Bloche (PS), Pierre Laurent (PCF), Catherine Morin-Desailly (Nouveau Centre) et Franck Riester (UMP). Soulignons qu’à ce stade, seul le PS a finalisé son programme Médias (voté le 29 mars 2011).

Les quatre élus se sont prononcés, dans une belle unanimité, pour un droit d’auteur à la française, mais ont fait entendre leurs différences sur d’autres sujets comme l’Hadopi, la redevance, la publicité diurne sur France Télévisions, et la nomination des présidents de l’audiovisuel public.

Pour ou contre la Hadopi

Catherine Morin Desailly (Nouveau Centre) soutient la Hadopi, dans le sens où elle a fait prendre conscience que la culture a un coût, et qu’elle représente des centaines de milliers d’emplois. Pour Franck Riester (UMP), deux éléments témoignent des effets positifs de la loi : selon les dernières enquêtes, 50% des internautes qui font l’objet d’un avertissement arrêtent de télécharger illégalement ; selon les déclarations d’Apple, I Tunes réalise la plus forte croissance de son chiffre d’affaires en France, grâce au débat et à la loi.

Du côté de l’opposition, Pierre Laurent (PCF) estime qu’il faut reprendre le problème dans son ensemble, en s’employant notamment à démocratiser l’accès à la culture. Pour Patrick Bloche (PS), le vrai problème est Hadopi 2 avec le « délit insensé de non surveillance de son accès Internet ». En cas de victoire aux élections présidentielles, le PS entend abroger la loi pénale. Patrick Bloche estime par ailleurs que la proposition de gestion collective des droits proposée par le rapport Zelnik-Cerrutti-Toubon est une mesure intéressante qui permet une vraie redistribution aux auteurs.

La Contribution à l’audiovisuel public (Cap) : faut-il l’augmenter et/ou en élargir l’assiette aux résidences secondaires ?

Comme tous l’ont rappelé, l’ancienne redevance, rebaptisée contribution à l’audiovisuel public (Cap), est désormais indexée sur l’inflation et va progresser d’environ 100 M€ par an.

Le PS souhaite encore l’augmenter en réintroduisant la taxe sur les résidences secondaires, afin de compenser la probable disparition de la taxe Télécom fragilisée à Bruxelles. Le PS souhaite par ailleurs que l’Audiovisuel extérieur de la France (AEF), qui ne bénéficie pas aux contribuables français, soit financée par le Ministre des Affaires étrangères, et que les 125 M€ de la Cap versés à l’AEF viennent abonder France Télévisions.

Les représentants des autres partis indiquent ne pas avoir encore tranché la question des résidences secondaires. Franck Riester évoque la difficulté de collecte, et le coût qui y est attaché. Pierre Laurent dénonce un problème général de fiscalité mais est favorable à l’amélioration du financement de l’audiovisuel public.

Catherine Morin-Desailly rappelle que la commission des affaires culturelles du sénat avait voté, de façon trans-partisane, pour une augmentation de la redevance de 2€. Elle se dit favorable aux moyens de financement qui confèrent une indépendance à l’audiovisuel public (comme la redevance), plutôt que pour une dotation budgétaire affectée par l’Etat. Elle milite aussi pour que la Cap soit élargie à tous les terminaux – téléviseur ou écran d’ordinateur – dans la limite de un par foyer.

Pour ou contre la publicité diurne

Franck Riester estime qu’il apparaît « assez sain de conserver la publicité de jour » et que cela a été très utile pour maintenir le financement de la création durant la crise de 2008-2009. Selon lui le modèle actuel est bénéfique aux programmes, sans avoir d’effet négatif sur le financement.

Pour Patrick Bloche, « on ne peut faire autrement » car « trouver 450 M€ dans le budget de l’Etat est irréalisable ». Le PS propose toutefois de donner une identité à France 4, en la destinant aux enfants, aux adolescents et aux jeunes adultes, et en y supprimant la publicité de jour comme de nuit.

Pierre Laurent estime que la question de la suppression de la publicité est indissociable de celle du financement, et qu’une mutualisation du financement public-privé est indispensable, si on ne veut pas que la réforme se fasse au détriment du public.

Catherine Morin-Desailly renvoie, quant à elle, au rapport qu’elle a co-écrit avec Claude Belot sur les comptes de France Télévisions, au nom de la commission Culture et de la Commission des Finances du Sénat, indiquant qu’elle est « pour un système clarifié ». Dans ce rapport, deux options étaient envisagées : soit la suppression de la publicité financée par un élargissement de l’assiette de la Cap aux résidences secondaires, soit un moratoire jusqu’en 2015, le temps que l’indexation de la Cap permette de financer les ambitions de l’audiovisuel public.

Sur la nomination des présidents de l’audiovisuel public

Tout en évoquant « un sujet mineur », Franck Riester estime que cette réforme permet « de sortir de l’hypocrisie et de contribuer à la transparence ». Patrick Bloche soutient au contraire que cette double dépendance budgétaire et politique entache de soupçon chaque décision de Rémy Pflimlin et de Jean-Luc Hess. Le PS propose que les présidents de l’audiovisuel public soient nommés par les conseils d’administration de ces dites entreprises, via un appel à candidatures. Une position partagée par Pierre Laurent, qui regrette « la présidentialisation accrue du régime et l’atrophie démocratique ». Selon Patrick Bloche, ces conseils d’administration devront être « renouvelés et pluralistes » avec une stricte égalité entre les parlementaires de la majorité et de l’opposition. Les représentants de l’Etat y seraient minoritaires.

Catherine Morin-Desailly ne s’est pas exprimé sur ce point précis, estimant que « la véritable indépendance est avant tout budgétaire ».

Le droit d’auteur à la française face à l’Europe

Les représentants se sont déclarés tous favorables à un droit d’auteur à la française, en souhaitant faire entendre cette voix en Europe et dans le monde.

Pour Franck Riester, il s’agit d’ « un combat international qu’il faut apporter au plus haut niveau de l’Etat et notamment au G8 comme vient de le faire Nicolas Sarkozy ». Pierre Laurent estime que la France doit reprendre le flambeau pour que le droit d’auteur à la française ne soit pas happé par les mécanismes du marché ». Pour Patrick Bloche, il faut, face aux géants de l’Internet que sont Google TV et Apple TV, construire un rapport de force au niveau européen, lever la clause de l’extra-territorialité, et se battre pour des baisses de TVA ciblées.

Catherine Morin-Desailly milite également pour « une action coordonnée et offensive » au niveau européen, indiquant qu’elle ne croit pas à la Taxe Google, qui s’avère « une double peine pour les petites entreprises numériques ». « Il faut surtout une harmonisation fiscale avec une TVA spécifique sur les biens culturels, car dans la cas des œuvres, il s’agit de biens et non de services, et c’est une notion qu’il faudra faire évoluer ».

> Lire également le communiqué du 30 mai > 2012, Demandez le programme…

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