194 personnalités (auteurs, producteurs, distributeurs, exploitants de salles mais aussi parlementaires…), poussent un cri d’alarme sur l’avenir des ressources du CNC et se mobilisent contre une décision dangereuse, déstabilisante et illégitime.

Depuis plusieurs années, notre pays s’est engagé dans un effort sans précédent de réduction de la dette et des déficits publics. Comme beaucoup d’autres, la politique de l’audiovisuel, du cinéma et le Centre National du Cinéma (CNC) ont été mis à contribution. On ne le sait pas assez mais de 2011 à aujourd’hui, ce ne sont pas moins de 310 millions d’euros qui ont été soustraits au financement du cinéma et de l’audiovisuel.

L’effort était important, il participait d’une démarche de solidarité nationale contre laquelle personne ne s’est élevé en cette période de crise. Mais, il doit désormais aussi trouver une limite : la justice et l’efficacité.

Or, à l’heure des arbitrages pour la loi de finances pour 2015, nous poussons un cri d’alarme.

Nul autre pays en Europe n’a su développer une politique du cinéma et de l’audiovisuel aussi efficace que la France.
Qu’on en juge : une fréquentation inégalée en salles de 200 millions de spectateurs chaque année, une création cinématographique supérieure à 200 films par an, une part de marché moyenne des films français de l’ordre de 40% (28% en Italie, 22% en Allemagne), une production audiovisuelle de plus de 5 000 heures par an et exportée à travers le monde entier (+14,8% en 2012), avec notamment une filière animation qui fait de la France le leader européen et la troisième puissance mondiale… Et l’impact économique est également important : les secteurs aidés par le CNC représentent plus de 16 milliards d’€ en valeur ajoutée et plus de 340.000 emplois.

Ces résultats reposent sur un financement public original pesant non pas sur le budget de l’État mais sur des taxes prélevées sur les recettes de tous les diffuseurs du cinéma et de l’audiovisuel. Affectées au CNC, et mutualisées au profit de la création française et européenne, ces taxes sont l’oxygène de la politique cinématographique et audiovisuelle.

L’an dernier, le gouvernement s’était engagé à ne plus ponctionner à l’avenir les ressources du CNC. Ces promesses sont en passe de s’envoler : avec le détournement programmé d’une partie du produit des taxes pour combler le budget de l’État, notre pays s’engagerait résolument dans la voie d’une politique dangereuse, déstabilisante et illégitime.

Dangereuse, l’initiative le serait assurément après déjà trois années de ponction conséquente des ressources du CNC. Les réserves, destinées à garantir les créances, ont progressivement disparu et le risque est maintenant réel de mettre en péril le soutien au cinéma et à l’audiovisuel.

Déstabilisante aussi car elle autoriserait chaque année l’État à fixer le niveau de ressources qui pourrait être soustrait au CNC, faisant planer de lourdes incertitudes sur une politique du cinéma et de l’audiovisuel, transformée en une simple trésorerie dans laquelle puiser.

Illégitime et confiscatoire même : comment justifier que des entreprises mises à contribution pour financer la création audiovisuelle et cinématographique voient finalement ces taxes utilisées pour boucher les trous du budget général ? Ce serait non seulement nier le principe d’affectation de ces taxes mais aussi instiller l’idée destructrice qu’il existe une sur-fiscalité culturelle.

Nous ne voulons pas croire que ce véritable pacte d’irresponsabilité pour notre cinéma et notre audiovisuel puisse dessiner demain les contours d’une politique. À l’heure de la multiplication des écrans et des canaux de diffusion et alors que le besoin d’images, d’œuvres cinématographiques et audiovisuelles continue de croître de façon exponentielle, ce serait un suicide politique et culturel que de désarmer le CNC et de mettre un terme à 70 ans d’ambitions pour le cinéma et l’audiovisuel avec des résultats uniques en Europe et dans le monde.

Nous n’oublions pas qu’il y a un an, notre pays, réuni et rassemblé, défendait l’exception culturelle. Il le faisait avec vigueur et efficacité en obtenant l’exclusion de l’audiovisuel et du cinéma des négociations commerciales entre l’Europe et les États-Unis.
Nul ne comprendrait que la France renonce aujourd’hui à ce qu’elle a défendu avec tant de force et de justesse auprès de ses partenaires européens : sa conviction en une politique ambitieuse en faveur de la diversité culturelle, du cinéma et de l’audiovisuel.

Nul ne le comprendrait car ce serait proprement incompréhensible.


Les 192 signataires

Auteurs
Christophe ANDREI, Sylvie AYME, Dominique BARON, Luc BERAUD, Julie BERTUCCELLI, Clémence DE BIEVILLE, Laurent BOUHNIK, Nicolas BOUKHRIEF, Hervé BRAMI, Pierre- François BRODIN, Isabelle BROUE, Laurent CANTET, Mathéo CAPELLI, Pascal CHAUMEIL, Malik CHIBANE, Elie CHOURAQUI, Clélia CONSTANTINE, Nina COMPANEEZ, COSTA-GAVRAS, Adeline DARRAUX, Sophie DESCHAMPS, Nicolas ENGEL, Jacques FANSTEN, Michel FAVART, Jean Teddy FILIPPE, Pascale FERRAN, Fabrice GENESTAL, Jacques-Rémy GIRERD, Christel GONNARD, Olivier GORCE, William GOTESMAN, Denys GRANIER-DEFERRE, Emmanuel GUST, Caroline HUPPERT, Jean-Pierre IGOUX, Yves JEULAND, Lou JEUNET, Pierre JOLIVET, Pascal KANE, Sam KARMANN, Liliane DE KERMADEC, Cédric KLAPISCH, Jan KOUNEN, Gérard KRAWCZYK, Jeanne LABRUNE, Philippe LAÏK, Franck LANDRON, Jean LARRIAGA, Claire LEMARECHAL, Delphine LEMOINE, Jean-Xavier DE LESTRADE, Laurent LEVY, Sébastien LIFSHITZ, Antoine LORENZI, Laurent HEYNEMANN, Nathalie LAFAURIE, François MARGOLIN, Radu MIHAILEANU, Sylvain MONOD, Gérard MORDILLAT, Alain NAHUM, Charles NEMES, Yves NILLY, Michel OCELOT, Marie-Anne LE PEZENNEC, Arnaud DES PALLIERES, Rithy PANH, Raoul PECK, Olivier PERAY, Nicolas PHILIBERT, Anne RAMBACH, Sandrine RAY, Brigitte ROÜAN, Christian ROUAUD, Christophe RUGGIA, Jean-Paul SALOME, Pierre SALVADORI, Coline SERREAU, Jöel SERIA, Pierre SCHOELLER, Guy SELIGMANN, Claire SIMON, Frédéric SOJCHER, Christiane SPIERO, Eric SUMMER, Bertrand TAVERNIER, Frédéric TELLIER, Marie-Pierre THOMAS, Pascal THOMAS, Bertrand VAN EFFENTERRE, Paul VECCHIALI

Distributeurs
Philippe AIGLE, Stéphane AUCLAIRE, Stéphane CELERIER, Brahim CHIOUA, Isabelle DUBAR, Valérie GARCIA, Victor HADIDA, Alexandra HENOCHSBERG, William JEHANNIN, Jean LABADIE, Amel LACOMBE, Didier LACOURT, Eric LAGESSE, Alexandre MALLET-GUY, Mathieu ROBINET, Michel SAINT-JEAN, Carole SCOTTA, Régine VIAL, Eric VICENTE

Exploitants de salles
Alain BOUFFARTIGUE, Jean Marc CARPELS, Laurent COËT, Cathy COPPEY Marie Christine DESANDRE, Sylvie DUPARC, Régis FAURE, Francis FOURNEAU, Jacques FRETEL, Michel FRIDEMANN, Jean HAFFNER, Alain KLOECKNER, René KRAUS, Eric LENGRAND, Laurence MEUNIER, Richard PATRY, Thierry TABARAUD, Didier TARIZZO, François THIRRIOT, Jean Pierre VILLA

Producteurs

Philippe ALESSANDRI, Thomas ANARGYROS, Laurence BACHMAN, Mathieu BOMPOINT, Florence BORELLY, Christine CAMDESSUS, Jérôme CAZA, Olivier CHANTRIAUX, Thibaut CHATEL, Alexandre CORNU, Dominique CREVECOEUR, Denis FREYD, Bertrand GORE, Serge GUEZ, Ludovic HENRY, Salam JAWAD, Nelly KAFSKY, Samuel KAMINKA, Bénédicte LESAGE, Marie MASMONTEIL, Christophe NICK, Marc DU PONTAVICE, Fabrice PREEL CLEACH, Emmanuel PRIOU, Marie-Hélène RANC, Antoine REIN, Guillaume RENOUIL, Pierre ROITFELD, Gilles SACUTO, Fabienne SERVAN-SCHREIBER, Patrick SOBELMAN, Mathieu VIALA, Igor WOJKOWICKS

Politiques et parlementaires
Pouria AMIRSHAHI, Guillaume BALAS, Fanélie CARREY-CONTE, Pascal CHERKI, Hervé GAYMARD, Michel HERBILLON, Frédéric HOCQUARD, Christian KERT, Pierre LAURENT, Noël MAMERE Francois DE MAZIERES, Jack RALITE, Franck RIESTER, Marcel ROGEMONT, Rudy SALLES, Catherine TASCA

Professionnels et Personnalités
Gilles JACOB, Marc LACAN, Pierre LESCURE, Dominique MASSERAN, Thierry DE SEGONZAC, Nicolas SEYDOUX, Marc TESSIER

> lien vers l’appel des 194