
25 juin 2024
Le point de vue des auteurices de l’audiovisuel au Sunny Side of the Doc 2024
La Scam dresse chaque année à La Rochelle, un état des lieux du secteur audiovisuel. L’occasion de donner le point de vue des auteurs et des autrices sur leur situation et les chantiers français et européens en cours.
La Scam, ses chiffres clés 2023
54 672 auteurs et autrices membres
38 776 ayants droit ont perçu des droits
116,10 M€ de droits d’auteur collectés dont plus de 80 M€ pour l’audiovisuel
109,87 M€ répartis aux ayants droit, dont plus de 75% concernent les exploitations audiovisuelles
181 117 œuvres audiovisuelles déclarées (plateformes et réseaux sociaux inclus)
2 776 715 € d’actions culturelles financées par la copie privée
Quel avenir pour l’audiovisuel public ?
L’audiovisuel public est actuellement confronté à deux projets majeurs, la fusion et la privatisation et son financement est loin d’être stabilisé.
Concernant la fusion
La Scam s’était fermement opposée à la proposition de loi sur l’audiovisuel public qui prévoit de réunir au sein d’une holding France Télévisions, Radio France, France Médias Monde et l’INA. Censée réaliser des économies et simplifier le mode de gouvernance, cette réforme s’annonce coûteuse, chronophage et déstabilisatrice. Les médias de l’audiovisuel public possèdent des réalités différentes. Les réunir dans une seule et même superstructure alourdirait considérablement leur fonctionnement.
Concernant la privatisation
La privatisation de France Télévisions et Radio France est bien plus dangereuse et déstabilisatrice encore que la fusion. Elle induira une chute des tarifs publicitaires auprès des annonceurs, et donc des recettes publicitaires des chaînes privées, déjà décroissantes, qui affaiblirait l’ensemble des diffuseurs audiovisuels.
Concernant le financement
Dans le cadre d’un financement désormais assuré par une dotation publique sans contribution citoyenne dédiée, il est urgent d’assurer un moyen de financement pérenne aux antennes publiques : la proposition de loi organique consistant à mettre en place un prélèvement sur recettes doit pouvoir parvenir à son terme dès après les échéances électorales.
Des avancées pour les autrices et les auteurs
Renouvellement des anciens accords de licence
La Scam entretient un dialogue permanent avec ses partenaires audiovisuels : elle suit l’évolution de leurs modèles économiques et adapte régulièrement ses accords de licence.
Un avenant à la licence déjà en place depuis plusieurs années a été signé avec Netflix en septembre 2023 afin de prendre en compte les recettes publicitaires que l’entreprise réalise avec ses nouvelles formules d’abonnement.
C’est également pour tenir compte de l’ajout de publicités chez LCP que l’accord avec ce diffuseur a été renouvelé en mai 2024.
Les accords FTV et Radio France ont été mis à jour respectivement en février et juillet 2023 pour intégrer notamment les matinales communes France Bleu / France 3.
La Scam a signé un accord avec MK2 Curiosity en novembre 2023 qui s’est adapté à sa mutation, puisque partant d’un service mettant à disposition quelques œuvres gratuites isolées, il s’est structuré en véritable service de vidéo à la demande par abonnement.
Elle travaille actuellement à l’intégration des chaînes dites « FAST » dans ses contrats d’autorisation pour prendre en compte ce nouvel usage qui se développent dans toutes sortes de média.
Signature de nouveaux accords de licence
La Scam a signé des accords de licence avec de nouveaux partenaires :
- Prime Video, en avril 2024. Cet accord rétroactif permet de remonter au lancement du service SVoD en France en décembre 2016.
- Arte, avec un nouvel accord bilatéral signé au début de 2024.
De nouveaux accords d’investissement dans la création
La Scam, aux côtés des organisations de producteurs et d’auteurs, a conclu d’importants accords d’investissement dans la création documentaire. Rendus possibles par le décret SMAD (2021), ils témoignent du succès grandissant que rencontrent les œuvres du réel en France et à l’international, et participent à la vitalité du genre documentaire.
- Avec TF1 et M6 en janvier 2023 : les chaines s’engagent pour la première fois à investir un pourcentage de leur chiffre d’affaires dans la création de documentaire, jusqu’en 2025.
- Avec Netflix France en septembre 2023 : la plateforme s’engage à réserver 5% de sa contribution audiovisuelle (16% du chiffre d’affaires) à des œuvres de documentaires de création (contre 0,6% auparavant), jusqu’au 31 décembre 2026.
- Avec Prime Video en avril 2024, rejoignant l’accord interprofessionnel dans lequel le service SVOD s’engage à investir 5 % de son obligation dans le documentaire, pour une durée initiale de quatre ans.
- Un accord de création avec France TV devrait voir le jour dans les prochains mois.
L’Europe et la culture
La Scam a interpellé en avril 2024 les candidates et candidats têtes de listes aux élections européennes sur les objectifs qu’elle juge prioritaires en matière de droits d’auteur et de régulation du secteur culturel et des médias :
- Faire prospérer une intelligence artificielle européenne respectueuse du droit d’auteur, en encourageant la constitution d’un marché de l’IA générative qui assure la protection des créateurs, et des ayants droit européens.
- Renforcer l’exception culturelle européenne, en créant un statut protecteur pour les « actifs culturels européens », en maintenant le principe de la territorialité des droits et le géoblocage des contenus et en pérennisant les mesures de promotion des œuvres audiovisuelles européennes (directive SMA).
- Affirmer le principe de rémunération proportionnelle pour les créatrices et créateurs européens, en adoptant une législation mettant fin à la pratique du « buy-out ».
- Intégrer le média audio dans la réglementation et les soutiens publics européens, en rendant éligibles les projets de création sonore dans le programme « Europe Créative ».
Les états généraux de l’information
Dans sa contribution adressée aux États généraux de l’information, la Scam, qui représente plus de 15 000 journalistes, a formulé des propositions pour mieux accompagner la profession. Des conclusions étaient attendues pour le 26 juin dernier, mais le contexte politique et institutionnel les a reportées sine die.
Concernant la carte de presse
Le Scam préconise une évolution du fonctionnement de la commission de la carte de presse (CCIJP) pour faciliter le travail des instances d’examens.
Il conviendrait d’opérer deux « couloirs » de demande distincts, assortis d’une période de délivrance propre à chacun :
- Celui des journalistes-salariés (CDI/CDD/Pigistes) qui fourniraient, comme actuellement et sans changement, les éléments justifiant de leur activité professionnelle.
- Celui des journalistes « indépendants » qui fourniraient la preuve que leurs revenus sont issus majoritairement de leur activité journalistique. Laquelle serait attestée par une présentation des documents écrits, sonores ou audiovisuels réalisés ou écrits par leurs soins. Et ce sur une période de deux ans, avec communication des preuves de rémunération (notes de droits d’auteur, factures, etc.).
Une telle réforme contribuerait à l’ouverture d’une seconde voie équitable, qui ne porterait aucune atteinte au statut des journalistes salariés et préserverait les acquis législatifs légitimement défendus par les organisations syndicales.
Concernant les droits voisins des éditeurs et agences de presse
La Scam préconise que la rémunération à verser aux journalistes par les éditeurs ne soit pas inférieure à 35% des sommes perçues auprès des plateformes en ligne.
Elle s’inquiète des risques de la désinformation, amplifiés par l’intelligence artificielle et milite pour que le projet de règlement, encore en négociation à Bruxelles, intègre des obligations de transparence solides.
Et enfin, la Scam, alerte sur la paupérisation du photojournalisme. Et notamment le recours abusif par les éditeurs de presse à la mention « droits réservés » ainsi que l’absence de respect des crédits photographiques et l’écrasement des métadonnées. Elle souhaite un meilleur encadrement de l’application des conventions.